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DES LÉGISLATIONS COMPARÉES.

lienne au sein de l’Europe ; si l’unité américaine persiste, cette durée méritera plus de gloire. Nous ne saurions parler pertinemment de l’Amérique ; elle est trop loin ; seulement il paraît que l’aristocratie de l’argent l’oppresse, et qu’il y a lutte entre les ambitions corruptrices d’une richesse immodérée, et la fierté laborieuse de la démocratie ; il paraît encore que la démocratie a pour elle la supériorité du talent et des services rendus au pays : Jackson est venu troubler l’uniformité du caractère américain par des passions obstinées, brillantes et fortes ; l’Amérique trouvera dans ses agitations les originalités et les grandeurs qui lui manquent encore.

La démocratie moderne, anglaise, américaine ou française se fonde sur l’intelligence et le travail : elle n’est pas comme la démocratie antique une minorité pesant par l’esclavage et la force sur les hommes qui n’étaient pas citoyens ; elle a pour loi l’égalité ; elle est universelle comme la pensée, infinie comme la mer, invincible comme l’avenir ; elle est l’humanité même, dans ce que l’humanité a de plus vivant, de plus pur et de plus sacré.

xi.

Puisque nous avons pris soin de ne nous engager dans l’histoire que munis de certains principes dirigeans qui pouvaient nous y guider, l’esprit de la même méthode nous conseille de nous recueillir après la course de nos explorations historiques, pour rechercher quelles peuvent être au siècle où nous sommes les notions les plus exactes touchant la sociabilité humaine qui demande à l’intelligence la règle de sa conduite et de sa destinée. Nous avons pour abréger appelé noocratie ce gouvernement de l’intelligence. Qu’on se rassure, nous ne ferons ici ni constitution ni catéchisme ; nous cherchons seulement quelques-unes des conditions les plus nécessaires de la vie sociale.

Le droit a sa manifestation la plus vivante dans la société même ; il a sa source dans l’intelligence de l’homme ; nous ne saurions admettre une distinction réelle entre le droit social, et le droit naturel ;