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NOUVELLES LETTRES SUR L’HISTOIRE DE FRANCE.

vernaient au nom du jeune roi se montrèrent durs et intraitables. Ils avaient pour prétexte le danger d’une rupture avec le roi de Neustrie ; ils ne manquèrent pas de s’en prévaloir ; et leur condescendance pour les affections de la reine se borna à congédier simplement le fils de Hilperik, sans lui faire de violence ou le livrer à son père[1]. Privé de son dernier espoir de refuge, Merowig reprit le chemin qu’il venait de suivre ; mais avant de passer la frontière du royaume de Gonthramn, il s’écarta de la grande route et se mit à errer de village en village à travers la campagne rémoise. Il allait à l’aventure, marchant de nuit et se cachant le jour, évitant surtout de se montrer aux gens de haute condition qui auraient pu le reconnaître, craignant la trahison, exposé à toutes sortes de misères, et n’ayant pour l’avenir d’autre perspective que celle de regagner sous un déguisement l’asile de Saint-Martin de Tours. Dès qu’on eut perdu sa trace, on pensa qu’il avait pris ce dernier parti, et le bruit en courut jusqu’en Neustrie[2].

Sur ce bruit, le roi Hilperik fit aussitôt marcher son armée pour occuper la ville de Tours et garder l’abbaye de Saint-Martin. L’armée parvenue en Touraine se mit à piller, à dévaster et même à incendier la contrée, sans épargner le bien des églises. Toutes sortes de rapines furent commises dans les bâtimens de l’abbaye, où une garnison était cantonnée ; des postes de soldats bivouaquaient à toutes les issues de la basilique. De jour comme de nuit, les portes en restaient closes, à l’exception d’une seule par laquelle un petit nombre de clercs avaient la permission d’entrer pour chanter les offices ; le peuple était exclu de l’église et privé du service divin[3].

  1. Sed ab Austrasiis non est collectus. Greg. Turon. Hist, lib. v, pag. 241. — Adriani Valessi, Rerum francic. lib. x, pag. 83.
  2. Merovechus verò dum in Remensi campaniâ latitaret, nec palàm se Austrasiis crederet. Greg. Turon. Hist., lib. v, 246. — Post hæc sonuit, quòd Merovechus iterùm basilicam sancti Martini conaretur expetere. Ibidem.
  3. Exercitus autem Chilperici regis usque Turonis accedens, regionem illam in prædas mittit, succendit atque devastat : nec rebus sancti Martini pepercit. Greg. Turon. Hist., lib. v, pag. 241. — Chilpericus vero custodiri basilicam jubet, et omnes claudi aditus. Custodes autem unum ostium, per quod pauci clerici ad officium ingrederentur, relinquentes, reliqua ostia clausa tenebant, quod non sine tædio populis fuit. ibid., pag. 246.