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fait son entrée dans la ville, à la tête de trois cents chevaux, ayant près de son cheval un ours monstrueux merveilleusement apprivoisé, et auquel il donnait sa main nue à lécher, comme il aurait fait à un chien.

On n’attendait plus que ceux de Zurich ; ils arrivèrent le 21 juin au soir. Ils étaient accompagnés des hommes de Turgovie, de Baden et des bailliages libres.

C’était plus que n’espéraient les confédérés ; aussi la ville de Berne fut illuminée, et l’on dressa des tables devant les portes des maisons en l’honneur des arrivans. On leur donna deux heures de repos ; puis le soir toute l’armée confédérée, pleine d’espoir et de courage, se mit en marche, chaque canton chantant sa chanson de guerre.

Le matin elle entendit les matines à Gumenen ; puis elle étendit son ordre de bataille sur le revers de la montagne opposé à celui où le duc avait placé ses logis.

Hans de Hallewyl commandait l’avant-garde. C’était un noble et brave chevalier de l’Argovie, que Berne avait reçu au rang de ses bourgeois pour le récompenser des hauts faits d’armes qu’il avait accomplis dans les armées du roi de Bohême, et dans la dernière guerre de Hongrie contre les Turcs. Il avait sous ses ordres les montagnards de l’Oberland, de l’Entlibuch, des anciennes ligues, et quatre-vingts volontaires de Fribourg qui, pour se reconnaître dans la mêlée, avaient coupé des branches de tilleul et les avaient mises en guise de panaches sur leurs casques et leurs chapeaux. Après eux venaient, commandant le corps de bataille, Hans Waldmann de Zurich, et Guillaume Herter, capitaine des gens de Strasbourg, auquel on avait donné cette part de commandement pour honorer en son nom les fidèles alliés qu’il avait amenés au secours de la confédération. Ils avaient sous leurs ordres tous les cantons rangés autour de leurs bannières, dont chacune était spécialement défendue par quatre-vingts hommes choisis parmi les vaillans, et armés de cuirasses, de piques et de haches d’armes. Enfin l’arrière-garde était conduite par Gaspard Hertenstein de Lucerne. Mille hommes, jetés de chaque côté à mille pas sur les flancs de cette armée, éclairaient sa marche dans les bois qui couvraient la pente du coteau qu’elle suivait en s’étendant de