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HISTOIRE ET PHILOSOPHIE DE L’ART.

une tête de sainte Cécile. Quant à la draperie, c’est un compromis savant, mais inacceptable selon moi, de la sculpture antique, de la sculpture gothique et de la sculpture de la renaissance. Ainsi, dans certaines parties, le nu se voit sous la draperie comme dans la sculpture antique ; ailleurs la draperie, amoureuse d’elle-même, ondoie et se joue sans s’inquiéter de rien traduire, comme il arrive aux artistes de la renaissance ; ailleurs, enfin, la draperie engage le nu sans le traduire et sans montrer à l’œil des lignes harmonieuses, comme on le voit dans les statues qui décorent des cathédrales ; c’est un ouvrage habile, mais ce n’est pas un des meilleurs de M. David.

La Prise d’Alexandrie, par M. Chaponière, est un bas-relief plein de qualités excellentes ; mais, selon moi, il y a deux critiques très graves à faire sur ce morceau. En premier lieu, l’exécution est trop uniformément avancée partout. Il n’y a point de sacrifices et partant point de clarté dans les faits. Toutes les figures sont également faites ; c’est pourquoi l’intérêt hésite avant de se fixer. En second lieu, le parti ronde-bosse, adopté par l’artiste, permettra difficilement à la lumière d’éclairer les figures qu’il a créées. Profilées sévèrement sur des plans moins distans l’un de l’autre, elles auraient été, je m’assure, plus intelligibles.

Mais il faut louer dans ce bas-relief une composition très bien entendue, l’économie des lignes, la sobriété des attitudes, le geste et l’accent des figures. À la droite de Kléber il y a un groupe très beau ; c’est celui d’un jeune Arabe qui reçoit dans le cou la baïonnette d’un de nos soldats, défendu par un Bédouin qui a jeté son burnouss, et qui offre au fer sa poitrine nue. À ses pieds est un Mameluck qui attend la mort avec résignation, et qui semble reprocher au ciel la défaite des siens. La figure de Kléber a de la grandeur et de l’énergie. Sans nul doute ce bas-relief sera l’un des meilleurs, sinon le premier, de l’arc de l’Étoile.

Le Passage du pont d’Arcole, par M. Feuchère, est fort inférieur au précédent morceau. L’exécution est lâchée ; les figures sont plutôt indiquées que faites : c’est une esquisse préparée assez facilement, mais qui a le grand malheur de rappeler, sans l’enrichir, une toile populaire d’Horace Vernet. Or, quand bien même le tableau d’Horace Vernet serait excellent, ce que je nie, ce ne