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HOMMES D’ÉTAT DE L’ANGLETERRE.

liques, réalise ses économies et part pour l’Amérique septentrionale ; la police et les soldats, chargés de maintenir l’ordre, sont entourés de pièges et forcés de lutter contre tout un peuple en armes ; un détachement est-il massacré, les coupables sont protégés par leurs voisins ; et O’Connell, tout en condamnant le meurtre, emploie sa gigantesque influence à les protéger contre la loi.

Le manufacturier cherche-t-il à employer son capital avantageusement ; ses ouvriers, animés par des harangues factieuses, se coalisent contre lui : dans son désespoir, il abandonne son entreprise et va chercher ailleurs une exploitation moins lucrative peut-être, mais plus certaine. Comme on a beaucoup déclamé contre les absentees ou Irlandais qui s’exilent de leur pays, le propriétaire essaie de venir habiter l’Irlande. Si ses biens sont situés dans une des provinces du sud, on tue ses domestiques, on outrage sa famille, on brûle ses fermes, il vit au milieu de l’insurrection. Au moindre acte d’indépendance qui déplaît aux agitateurs, il est dénoncé à la populace, tourmenté et insulté dans le sein de sa famille, poursuivi jusque dans ses foyers.


Malheureux pays que celui où tous les rapports de famille et de société sont empoisonnés par le fanatisme politique et religieux ! Industrie, commerce, vertus publiques et privées, tout s’anéantit, tout disparaît sous cette influence délétère. Les politiques européens, qui désirent la chute du colosse britannique, n’ont pas d’instrument et d’allié plus sûr que le brillant O’Connell et la faction qu’il commande. Quant à ceux qui aiment l’Angleterre et qui désirent non-seulement la stabilisation de son gigantesque pouvoir, mais son application utile à la grande cause de la civilisation, ils ne peuvent que regarder avec douleur et avec crainte ces hommes effrénés, dont la violence, arrachant sans cesse au gouvernement de nouvelles mesures despotiques, le force de s’allier aux partisans de l’autorité arbitraire, et le précipite ainsi dans les bras des ennemis éternels de la justice et de la vérité.

UN MEMBRE DU PARLEMENT.