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REVUE DES DEUX MONDES.


Lui toujours se débat, heureux et transporté,
Au milieu des vapeurs de la musique, et flotte
Dans l’étendue, et voit resplendir chaque note
Sur un ciel d’harmonie et de sonorité.

Il chante sa chanson joyeuse ou lamentable,
Et galope toujours, et ne s’aperçoit pas
Que les ardens coursiers qu’il traînait sur ses pas
Se sont tous arrêtés et dorment à l’étable.

Ainsi, divin Jésus, nous chanterons encor,
Alors qu’aura cessé ta symphonie immense,
Car l’inspiration qui nous met en démence
Ne peut, ô Jésus-Christ, fermer ses ailes d’or.


(On frappe à la porte avec véhémence.)
Le docteur Onufro.

Qui frappe donc ainsi ?

Le Commandeur.

Je n’attends plus personne à cette heure.

Le cardinal Rafaël.

C’est peut-être un vivant qui vient chercher asile chez les morts. Ouvrez, commandeur.

(Le commandeur ouvre, Anna s’élance vers lui.)
Anna.

Ô mon père, mon père !

(Elle tombe dans ses bras tout en larmes et reste immobile sous l’impression du jugement de Dieu. Les statues qui priaient à genoux se lèvent, entourent le commandeur qui soutient sa fille, et demeurent un instant en contemplation.)
CHOEUR DES STATUES.

Que cette fille est belle ainsi de blanc vêtue !
Qu’elle est belle ! on dirait une pâle statue
Sans ses longs cheveux noirs, flottans et déliés,
Qui tombent d’un seul jet de sa tête à ses pieds,
Et font le voile auguste où sa pudeur s’abrite.
Non jamais ici bas, Thérèse et Marguerite