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la révolution de juillet. Quant au ministère, je n’en doute pas non plus ; mais, sous l’un et l’autre de ces régimes, M. Guizot, revenu à lui, eût fait ce qu’il a fait, du pouvoir et de la résistance. Sans doute l’homme qui a écrit les lignes suivantes se serait rallié avec empressement à la république, comme il s’est rallié à la nouvelle monarchie : « La force a ses vissicitudes, celle d’aujourd’hui peut n’être pas celle de demain ; la plus prépondérante a des égaremens où il ne faut pas la suivre : mais quand elle se présente avec l’empire d’un arrêt de la Providence, quand elle a revêtu les caractères de la nécessité, il y a folie à se séparer d’elle, à prétendre s’établir hors de son sein. » Une fois donc que M. Guizot se sentit bien établi au sein de cette force vers laquelle l’attire une certaine puissance d’attraction, après que M. Périer eut fait renaître l’influence gouvernementale, dans un temps où personne en France n’avait le courage de faire du pouvoir, pas même M. Guizot, celui-ci revint à ses doctrines d’autrefois, et s’entoura de ses anciens disciples qu’il avait laissés depuis long-temps en arrière, et qui avaient vécu tristement dispersés comme ceux de Pythagore. À l’ombre de Casimir Périer, s’appuyant de son énergique volonté et de son humeur batailleuse, l’école doctrinaire retrouva une sorte de calme, et la sérénité qu’il lui faut pour professer ses vues. Blottie sous cette égide, elle se sentit de force à affronter les hommes des comités populaires qui l’avaient écartée, et à son tour elle les mit à l’écart sans façon. Engagé dans cette route, M. Guizot y marcha rapidement. Bientôt il inventa un blason pour la monarchie nouvelle, il lui forgea une légitimité bâtarde qui mit en repos sa conscience d’historien ; et s’échauffant dans ses conceptions, se raidissant contre les murmures de l’opinion, il ne tarda pas à se trouver presque à son point de départ de 1815, déclamant contre les théories et les rêveries d’améliorations politiques, et invoquant l’impopularité comme moyen de gouvernement. Dès lors, c’est à pas de géant que M. Guizot rétrograde. Vous connaissez la double faculté qu’il possède de s’occuper de petites manœuvres en même temps que de grandes théories ; il se mit donc à la fois à formuler en doctrines les boutades de colère de Périer, et à discipliner les centres, tout jeunes encore, qui apprirent sous lui les évolutions parlementaires à l’aide desquelles on enlève aujourd’hui