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cour aux officiers et à l’équipage de la Surveillante, et réparties ainsi qu’il suit : Du Couëdic, le grade de capitaine de vaisseau ; la Beutynaie, la croix de Saint-Louis et une pension de mille francs ; le chevalier de Lostange, la croix de Saint-Louis et une pension de trois cents francs ; Dufresneau, officier auxiliaire, le grade de lieutenant de frégate dans la marine royale, et peu après celui de capitaine de brûlot ; Vauthier, officier auxiliaire, ce même grade de lieutenant de frégate, plus une gratification de deux mille quatre cents francs pour aller aux eaux se rétablir de ses blessures ; puis enfin le vicomte de Roquefeuil, commandant le cutter, la croix de Saint-Louis. Le brave Le Mancq ne fut point, ne devait point être oublié : il obtint une médaille qui s’attachait avec le même ruban que la croix de Saint-Louis, et où se trouvait gravé le récit de sa belle action ; et de plus une pension assez considérable. D’autres récompenses encore, et en grand nombre, furent accordées au reste de l’équipage, dans la proportion des services rendus par chacun. Les blessés, les matelots qui s’étaient distingués, les veuves et les enfans de ceux qui avaient péri, trouvaient dans Du Couëdic un protecteur infatigable ; il ne pouvait se lasser de les recommander au commandant de la marine. Quelquefois, emporté par son zèle, il faisait même écrire directement au ministre, M. de Sartine, en son propre nom ; et s’émerveillant aussitôt de ce crédit subit, de cette importance improvisée, il se prenait à dire, avec une gaîté pleine d’une naïve bonhomie : « Eh bien ! messieurs, qui vous l’aurait dit ? voilà le chevalier Du Couëdic, cinq ou sixième cadet, devenu un homme à protection ! » Malgré tant d’autres soins et de soucis, il se préoccupait souvent encore du sort des matelots anglais. La décision de les considérer comme naufragés, qu’il avait cru devoir prendre à leur égard, ayant été confirmée par le ministre, il en témoigna une vive satisfaction, aussi vive que si la chose lui eût été personnelle.

La douceur de ces émotions n’en était pas moins impuissante à reculer pour Du Couëdic le dénouement fatal. Les blessures de la tête avaient été assez promptement guéries ; celle du bas-ventre ne fit qu’empirer de jour en jour. Après avoir traversé les intestins, la balle s’était logée dans les reins, d’où ne purent l’extirper les mains des plus habiles chirurgiens : là s’était formé un dépôt