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REVUE DES DEUX MONDES.

ELSBETH.

Je veux savoir la raison qui vous a fait prendre ce costume.

FANTASIO.

Je vous supplie, épargnez-moi.

ELSBETH.

Non, non ; parlez, ou je ferme cette porte sur vous pour dix ans.

FANTASIO.

Madame, je suis criblé de dettes ; mes créanciers ont obtenu un arrêt contre moi ; à l’heure où je vous parle, mes meubles sont vendus, et si je n’étais dans cette prison, je serais dans une autre. On a dû venir m’arrêter hier au soir ; ne sachant où passer la nuit, ni comment me soustraire aux poursuites des huissiers, j’ai imaginé de prendre ce costume et de venir me réfugier aux pieds du roi : si vous me rendez la liberté, on va me prendre au collet ; mon oncle est un avare qui vit de pommes de terre et de radis, et qui me laisse mourir de faim dans tous les cabarets du royaume. Puisque vous voulez le savoir, je dois vingt mille écus.

ELSBETH.

Tout cela est-il vrai ?

FANTASIO.

Si je mens, je consens à les payer.

(On entend un bruit de chevaux.)
LA GOUVERNANTE.

Voilà des chevaux qui passent ; c’est le roi en personne ; si je pouvais faire signe à un page ! (Elle appelle par la fenêtre.) Holà, Flamel, où allez-vous donc ?

LE PAGE, en dehors.

Le prince de Mantoue va partir.

LA GOUVERNANTE.

Le prince de Mantoue !

LE PAGE.

Oui, la guerre est déclarée. Il y a eu entre lui et le roi une scène épouvantable devant toute la cour, et le mariage de la princesse est rompu.