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HOMMES D’ÉTAT DE L’ANGLETERRE.

fallait une grande fermeté, un remarquable dédain de la clameur populaire. Brougham convenait admirablement à cette sorte de guerre. Mais rien n’a tant contribué, on le sait, à diminuer l’estime publique pour les whigs que cet épisode de leur conduite parlementaire. Après la paix de 1815, l’opposition commença à reconquérir sa première influence dans le pays, grace à la détresse qui suivit la cessation des hostilités et les dépenses exorbitantes du gouvernement. Toutefois il ne se présenta aucun événement important qui pût changer l’état politique de l’empire britannique jusqu’à la mort de George iii. Alors, on le sait, le cri d’une femme vint troubler la tranquillité du nouveau monarque, et remua jusqu’en ses fondemens le plus solide gouvernement de la terre.

En 1814, la princesse Caroline de Brunswick, femme du prince régent, avait quitté l’Angleterre contre l’avis, dit-on, de ses agens confidentiels, MM. Whitbread et Brougham. Dès les premiers temps de son mariage, elle avait été l’objet d’une extrême aversion de la part de son mari. Les amis et les flatteurs du prince cherchaient avidement des sujets d’accusation contre elle.

Ces accusations avaient pris une forme sérieuse en 1806 ; à la requête même de la princesse, une enquête eut lieu devant plusieurs jurisconsultes et hommes d’état qui déclarèrent les charges mal fondées. Georges iii, tant qu’il conserva sa raison, avait été favorable à la princesse ; les autres membres de la famille royale, et particulièrement la reine, partageaient les sentimens hostiles du prince. Caroline fut constamment exclue de la cour ; sa fille unique, la princesse Charlotte, lui fut enlevée. Après plusieurs altercations avec les ministres, Caroline se résolut à quitter le pays avec la promesse d’une pension considérable qui ne devait cesser qu’à la mort de son mari. Peut-être fut-elle déterminée à cette résolution par le sentiment de la position humiliante à laquelle elle avait été soumise, lors du séjour des souverains alliés en Angleterre, quand la cour était pleine de fêtes et de réjouissances auxquelles elle ne pouvait assister.

Pendant quelques années, elle demeura sur le continent, presque oubliée du peuple anglais ; seulement, de temps en temps, on apprenait sur sa conduite quelques détails qui n’étaient pas à son avantage.