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là la reconnaissance d’Urbano par son père Frédéric et celle de sa mère qui devient l’impératrice Silvestra. »

À travers le voile allégorique de ce roman, on distingue évidemment la naissance, les progrès, les vicissitudes, et enfin le triomphe rêvé par les Gibelins, de leur secte antipapiste et du jargon qu’elle avait adopté. Cette île déserte (Dispersa) où s’opèrent la désunion et la dispersion des sectaires trahis par quelques-uns d’entre eux ; l’aveu d’Urbano à Lucrezia lorsqu’ils sont abandonnés, qui peint si clairement les ménagemens et les concessions que les partis opposés étaient obligés de se faire entre eux ; ce pavillon brillant, espèce de drapeau catholique qui sert de sauvegarde à Urbano et à Lucrezia ; le patron de vaisseau qui vient au secours de la secte pour la garantir des lions de l’île, lions qui indiquent l’influence des Français contre le parti gibelin en Toscane ; les deux époux représentant, sous les habits de pauvres pélerins allant à Rome, la secte malheureuse, presque réduite à rien ; cet hôtellier, le peuple, qui ne reconnaît plus Urbano, parce qu’il y a long-temps qu’il ne l’a vu, et qu’il le revoit dans la disgrace ; les deux époux, ou la secte qui met enfin le pied sur les marches du Capitole, le but de tous ses désirs, la cause de ses malheurs, l’objet constant de ses efforts, et enfin tant d’autres allégories qui, de ce qu’elles ne sont pas claires pour notre siècle, n’en étaient peut-être que plus frappantes pour celui où elles ont été employées, sont trop patentes et parfois trop faciles à saisir pour croire qu’au moins, en commentant l’Urbano de Boccace, M. Rossetti se soit trompé.

Au surplus, nous répéterons que les travaux de M. Rossetti sur ce dernier écrivain sont certainement ce qu’il y a de plus fort et de plus concluant en faveur de l’opinion qu’il a émise sur l’existence d’une secte antipapiste, et sur l’usage, la nature et le caractère du jargon figuré qu’elle employait dans les xiiie et xive siècles.

Quoique je ne puisse dissimuler que les analyses critiques que M. Rossetti a faites des romans si obscurs de Boccace, aient singulièrement corroboré dans mon esprit la puissance des observations analogues appliquées aux ouvrages de Dante et de Pétrarque, cependant je dois signaler quels sont les écrits de ces deux derniers qui, à mes yeux, atténuent la force de l’opinion du nouveau com-