— C’est une trombe ! une trombe ! s’écrièrent alors en même temps officiers et matelots.
— Le canon de l’avant est-il prêt ?
— Oui, capitaine.
— Est-il chargé !
— Oui, capitaine.
— Lofez un peu… Bien ! Feu !
Le boulet coupa la colonne par sa base : elle trembla, chancela un instant, puis tomba tout à coup, semblable à une immense avalanche, et l’Océan, quelques minutes après, ne laissait aucune trace de ce phénomène extraordinaire.
Le lendemain, à la brune, nous eûmes une vive alerte qui, heureusement, nous fit plus de peur que de mal. Le temps était bon ; le vaisseau marchait avec facilité ; la mer était libre. Tout à coup une forte odeur de poudre se fait sentir. Dans un bâtiment de guerre il y a bien de quoi jeter la terreur dans toutes les ames, car il y va de la vie. On est menacé de faire une cabriole jusque dans les nuages, rien que cela. — On appela le maître canonnier.
— Que signifie cette odeur de poudre, M. Jenkins ? dit le capitaine.
Le vieux canonnier restait silencieux, mais tendait le nez vers la cale, prenant une forte aspiration ; nous le vîmes tout à coup changer de couleur, et devenir aussi blanc qu’un linge. Aussitôt il se précipita dans la cale, et disparut. Nous nous élançâmes à sa suite, et nous vîmes ce qui avait causé nos alarmes : les mousses s’amusaient à faire des fusées. Une bonne distribution de coups de garcettes, dont on leur caressa la face la moins poétique, leur apprit qu’ils devaient être plus circonspects à l’avenir.
Quelques jours après, le vent s’éleva, le temps devint orageux, le tonnerre commença à gronder sourdement ; et, comme la tempête augmentait de moment en moment, il fallut ferler les voiles de hunes. Un des matelots montés sur les vergues fut lancé à la mer par un coup de vent.
— Jetez-lui une corde, s’écria le lieutenant !
Ce n’était pas chose facile que de sauver ce malheureux : le vaisseau marchait avec une rapidité telle que, lorsqu’on parvint enfin à lui lancer une corde, qu’il se passa aussitôt sous les aisselles, il