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LITTÉRATURE ANGLAISE.

pour y trouver une lecture amusante, en jugèrent autrement. Peu de drames modernes peuvent rivaliser d’intérêt avec celui-là. Le caractère du vieux sir Allan Swinton qui a vu mourir ses sept fils, et qui n’a conservé la vie que pour les venger ; celui du Jeune Gordon dont il a tué le père en vengeant ses enfans, sont tracés avec beaucoup d’art : il est difficile de lire certains passages de cette pièce sans être ému jusqu’aux larmes. On doit regretter que l’auteur y ait prodigué les descriptions inutiles.

Ce poète déploya dans sa pièce d’Auchendrane un véritable génie tragique, et imposa silence à ceux qui avaient désiré qu’il choisît un sujet plus moderne. Plusieurs scènes sont conçues et exécutées avec toute la force de talent qui avait créé les meilleures pages de Waverley ; la versification est plus correcte et plus nerveuse que celle d’Halidon-Hill ; néanmoins ses œuvres dramatiques se trouvaient tellement éclipsées par ses admirables romans, que le public se plaignit encore. Mais il y a bien de la différence entre ces deux genres de compositions : le roman permet de revenir sur le passé tout en faisant marcher les évènemens ; dans le drame moderne, il faut que tout s’adresse à l’œil et à l’oreille. Scott le savait bien, sa correspondance sur l’art dramatique en fait foi ; mais il n’est pas le premier grand écrivain qui ait tracé des règles sans pouvoir les suivre lui-même.


Le génie de Coleridge est poétique plutôt que dramatique. Sa versification est riche et brillante, elle abonde en pensées élevées ; ses images ont un luxe pittoresque et une richesse d’imagination que peu de poètes ont égalés. Mais il aime par-dessus tout l’obscurité de la métaphysique, il n’est pas assez clair pour le public, et sa réputation populaire en a souffert, bien qu’elle se soit soutenue brillante parmi les plus hautes intelligences du pays. Sa pièce intitulée le Remords fut très bien accueillie par le public ; elle est remplie de scènes de la plus grande force. L’intrigue est loin d’être claire ni probable. Le long espace de temps qui s’écoule entre les actes demande un trop grand effort d’imagination. Le principal mérite de cette pièce consiste dans le pittoresque de sa versification, et son principal défaut dans les idées abstraites et métaphysiques qu’elle renferme.

C’est plutôt un poème qu’un drame, on y remarque une imitation visible de Shakspeare. « Mais sa manière d’imiter, » dit un de ses critiques, « est telle qu’on la sent partout sans la voir nulle part : c’est une ressemblance de l’ensemble et non des détails. » Coleridge enfin a de magnifiques passages, mais qui ne se rattachent point intimement au sujet, et, comme auteur dramatique, il ne peut aspirer qu’à un succès de lecture.


Il y a de grandes beautés dans les drames de lord Byron. C’est là surtout que sa muse plane d’un vol élevé ; mais comme drames s’adressant