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MÉLANGES.

barreaux ; il tremblait, criait et paraissait en proie à des angoisses si grandes, qu’il finissait d’ordinaire par exciter notre compassion et nous forcer à cesser le jeu. Quelquefois cependant nous voulûmes le contraindre à s’avancer vers le lieu où la petite souris, ne se doutant guère de la frayeur qu’elle inspirait, et n’en ressentant elle-même aucune, trottinait pour gruger des miettes : il en coûtait toujours beaucoup de peine pour l’obliger à se mouvoir, et nous n’y réussissions guère qu’en faisant partir près de lui un pétard ; mais alors, au lieu de s’avancer tout droit ou de prendre un détour pour éviter l’objet de ses craintes, il faisait un bond d’une telle hauteur, que son dos atteignait presque le sommet de la cage. »

On n’a jusqu’à présent reconnu dans notre chat domestique rien qui ressemblât à ces étranges antipathies du tigre et du lion pour les souris, mais chacun connaît et personne ne s’explique l’extrême passion qu’il a pour certaines plantes, pour le marum, la valeriane, et surtout pour le nepeta cataria. Pour conserver cette dernière plante dans les jardins, on est obligé de l’entourer d’un treillage fermé. Si on néglige cette précaution, les chats l’ont bientôt détruite à force de se rouler sur elle. L’odeur les attire de fort loin et paraît les rendre ivres de plaisir[1] ; ils passent et repassent sur la touffe, se caressent contre les rameaux et mordent dans une sorte de frénésie les feuilles dont cependant ils ne se nourrissent point.

D’autres plantes produisent sur certains animaux des effets non moins marqués, mais tout contraires ; tel serait, s’il en fallait croire Pline, l’effet du frêne sur les serpens. « Rien, dit-il, n’est meilleur contre la morsure des serpens que de boire le jus des feuilles de frêne et d’appliquer les feuilles sur la plaie. L’arbre lui-même est si contraire à ces animaux, qu’ils en fuient jusqu’à l’ombre. J’ai vu,

  1. Il paraîtrait que l’odeur de l’assa-fœtida produit sur les loups un effet analogue. Ainsi, dans les livres de secrets on trouve, à l’article des moyens indiqués pour la destruction des bêtes fauves, la recette d’une composition dans laquelle cette drogue entre comme principal ingrédient, et dont les hommes qui vont amorcer les pièges à loups doivent frotter la semelle de leurs souliers. À la vérité les livres qui traitent de ces matières sont remplis d’absurdités si choquantes, qu’on est toujours tenté de rejeter sans examen tout ce qu’on y rencontre d’un peu suspect ; mais ici peut-être serait-ce aller trop loin que de nier l’efficacité de la recette ; et nous savons que dans plusieurs parties de l’Amérique septentrionale on emploie