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REVUE DES DEUX MONDES.

la porte des palais déserts, ou d’avoir pris tant de fois le message du poëte, sur sa fenêtre, pour le porter au bout de l’infini ?

LE PÈRE ÉTERNEL.

C’est assez ! Vous aussi vous avez douté votre heure, sous votre tente de lumière. Rendez-moi tous vos brillans pour m’en faire un pendant d’oreille. De l’aurore jusqu’au couchant, au loin, à l’alentour, des plis du firmament, du sommet de la vague, de la cime de l’arbre, où vous vous éveillez, rendez-moi tous vos joyaux, qui étincellent, pour m’en faire une bague à mon doigt.

CHŒUR DES FEMMES.
i.

Le chemin de la terre que nous faisons en pleurant est trop rude pour nos pieds. On s’y blesse sans épines, sans pierres on s’y meurtrit. Quand elle s’est lassée, la fleur s’est penchée sur sa tige. L’étoile fatiguée s’est reposée sur un nuage. Mais notre cœur hors d’haleine n’a plus pour s’appuyer ni nuage ni tige.

ii.

Maints soupirs, que personne n’a entendus, ont consumé notre souffle sur nos lèvres ; et un mal de chaque jour, sans nom, sans cicatrice, a usé comme une lime l’espérance dans notre sein. J’aimerais mieux compter les cheveux de ma tête que les larmes invisibles qui ont coulé dans mon ame. Sans me plaindre, dans ma maison, j’ai fait mon ouvrage, j’ai filé mon rouet, j’ai soufflé dans mes cendres ; mes cendres sont éteintes. Trop de pleurs y sont tombés l’un sur l’autre ; et le fuseau, où mes désirs murmurans roulaient et déroulaient leur lin à la veillée, s’est brisé entre mes doigts.

MATER DOLOROSA.

Pitié ! pitié ! Miserere !

CHŒUR DES FEMMES.
i.

Je n’étais rien que soupir et que rêve. Avant que mon cœur fût rempli, tous mes jours ont coulé ! ma vie s’est usée entre mes doigts, et mon ame est restée au milieu de sa tâche d’amour, comme un ouvrage qu’on laisse à peine commencé, retombe sur vos genoux, quand l’aiguille et le fil sont rompus. Je voudrais une