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REVUE DES DEUX MONDES.

dressent dans mon cœur. Rendormez-vous, mes espérances. Ah ! tous mes désirs, rendormez-vous d’un long dormir. Dans ma cendre que je remue, il n’est point d’or. Tout est poussière qui s’attiédit.

vii.

La chose est certaine. Je débute mal. Un cœur d’homme tout seul ne vaut rien pour y puiser la science. Trop de dards bien aiguisés l’ont percé et troué comme un crible. La vérité y passe, elle ne s’y arrête pas. Le genre humain ferait certainement mieux mon affaire.

viii.

Par où le prendre aussi ? Son bruit est déjà effacé. Dans son livre le vers a rongé son image, et la page qui portait son nom tombe en poudre sous ma froide haleine. Aujourd’hui il est trop tard pour déchiffrer comment ses empires et ses peuples s’appelaient. Ma lampe s’use ; elle pâlit. Ah ! qu’il fait noir dans ma science !

ix.

Monde qui clos ta paupière sur mon ame sans pleurer, vide infini, noir néant, dis-moi donc au moins, toi, qui tu es. À ton dernier moment, exhale comme un soupir un mot de vérité. Avant de s’engouffrer dans l’Océan, le fleuve se retourne et donne son secret au brin d’avoine qu’il désaltère. Mystérieux torrent, veux-tu t’engloutir sans jeter seulement ton nom au roseau que tu déracines ?

LE SERVITEUR DU DOCTEUR.

Seigneur docteur, un étranger qui vient de loin demande à vous parler.

LE DOCTEUR.

Si c’est mon respectable maître de dogmatique, le docteur Thomasius de Heidelberg, ou mon doux ami Sylvio, faites-les entrer.

(Entre l’ange du jugement dernier.)
L’ANGE.

Jette là à tes pieds tes livres et ta renommée, suis-moi.

LE DOCTEUR.

Laissez-moi ; il ne me faut plus qu’un jour pour découvrir le secret de la vie.

L’ANGE.

Viens apprendre le secret de la mort.