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FÊTES DE LA JURA.

fert, que, pour être rendue digne de la cérémonie qui allait se passer, elle exigeait d’énormes réparations. — Et puis, si les généraux de Napoléon ne l’avaient guère ménagée, — sous le prétexte de fermer les plaies que lui avait faites la guerre, les architectes de Ferdinand vii l’avaient traitée peut-être avec plus de barbarie. — Ils s’étaient contentés de blanchir au dedans son vaisseau gothique, uniquement, j’imagine, parce qu’ils n’avaient osé ou rien pu davantage contre lui. D’ailleurs, le portail ayant été mis à leur discrétion, ils l’avaient affublé galamment de je ne sais quelle devanture de plâtre figurant des colonnes corinthiennes de marbre rose et vert. Une fois qu’on eut la main à l’œuvre, on ne se borna pas à consolider le pauvre édifice et à l’orner intérieurement, on voulut autant que possible expier le sacrilège des maîtres maçons iconoclastes qui l’avaient défiguré. Sur la façade soi-disant grecque, on replaqua une façade tant mal que bien gothique, formée en partie de châssis et de toiles peintes, — comme une décoration de théâtre.

En vérité, il semblait qu’on eût écrit sur cette église le résumé des vicissitudes politiques de l’Espagne durant les vingt dernières années ! — L’antique monarchie absolue s’étant trouvée singulièrement lézardée et ébranlée après l’invasion française, pour la renouveler, de maladroits réformateurs avaient cru qu’il suffisait de la badigeonner de liberté et d’y ajouter un vestibule constitutionnel. — Maintenant, cette charte postiche jetée bas, on refaisait au vieux monument un portail du xve siècle. — Celui-là serait-il plus solide ? N’était-ce pas là une restauration bien tardive ?

Mais ne cherchons point, mon Dieu ! des révolutions dans des fêtes ! On avait mis du gothique à San-Geronimo, parce que le gothique était à la mode à Madrid, parce qu’on en avait mis partout. — Comme si cette ville coquette, qui se parait si magnifiquement pour ses funciones reales, avait aussi rougi de montrer dans toute leur nudité ses fontaines, — la plupart du meilleur temps du mauvais goût, — elle les avait voilées d’élégantes chapelles gothiques. — Bizarre encadrement ! Au travers des trèfles à jour et des ogives ouvertes, on vit les Tritons, les Naïades et les Amours de Ribera, se jouer au milieu de leurs guirlandes, de leurs coquilles et de leurs chicorées.

Ce n’était pas seulement le gouvernement et son excellence el