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HOMMES D’ÉTAT DE LA FRANCE.

eût supporté ce supplice de sept ans ? Ce ne fut cependant que de vive force qu’on l’arracha de son siège, et encore fit-il des efforts inouis de persévérance et d’adresse pour y rester.

Beaumarchais fait dire à son joyeux Figaro qu’il lui a fallu plus d’esprit et de capacité pour subsister seulement, qu’il en faut pour gouverner les treize royaumes de la monarchie. M. Villèle pouvait en dire autant. Qui voudrait contester l’incontestable supériorité de cet esprit heureux et délié, en songeant que son crédit reste le même auprès de Louis xviii et de son successeur Charles x ? M. Villèle avait été porté au ministère par le comte d’Artois lui-même, qui avait pris la peine de vaincre la répugnance qu’éprouvait son frère contre l’habile chef du parti royaliste ; mais il était impossible de se maintenir au pouvoir en plaisant à la fois au roi et au comte d’Artois. M. Villèle courut au plus pressé, et plusieurs fois il s’exposa au ressentiment de Monsieur, qui ne lui ménagea pas l’expression hautaine. Les amis du comte d’Artois, M. de Polignac, M. de Montmorency, M. de Rivière, tous écartés des grandes affaires par M. Villèle, s’étaient déclarés presque ouvertement ses ennemis personnels. Le duc d’Angoulême et sa femme n’aimaient pas non plus le premier ministre, qui n’affecta jamais, il faut lui rendre cette justice, ni la dévotion, ni le fanatisme du parti religieux. En peu de jours, cependant, ce ministre haï, repoussé, contre qui on avait de justes motifs de défiance et de mécontentement, devint l’homme nécessaire. Le roi répondait avec humeur à ceux de ses intimes qui attaquaient la personne et le caractère de M. Villèle ; le Dauphin allait partout disant qu’on l’avait méconnu, et qu’il était rempli des meilleures intentions, et la Dauphine gardait un bienveillant silence. C’était beaucoup pour elle. Quelques paroles dites à propos, par M. Villèle, à l’oreille de la congrégation, avaient opéré tous ces heureux changemens.

L’ordre de présentation de quelques projets de lois de la session, expliquera suffisamment la nature de ces paroles.

Indemnité des émigrés.

Loi du sacrilège.

Loi en faveur des communautés religieuses.

M. Villèle se dévoua complètement. Sa loi d’indemnité fut attaquée par l’opposition libérale avec une chaleur et une verve bril-