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REVUE. — CHRONIQUE.

Il résulte de ce rapport que le château de Versailles sera érigé en musée, et qu’on y placera des tableaux représentant tous les évènemens militaires de notre histoire, depuis la bataille de Tolbiac jusqu’au siège de la citadelle d’Anvers, dit le rapport, c’est-à-dire, depuis le partage équitable du vase de Soissons jusqu’aux affaires de fournitures et aux marchés de la campagne de Belgique. L’idée est on ne peut plus heureuse.

Ce qui semble plus certain, d’après ce rapport, c’est qu’on va porter la pioche et la truelle dans le château de Versailles, qui se flattait vainement, dans son coin, d’échapper au sort que vient de subir le palais des Tuileries. — « Pour réaliser le magnifique ensemble que Votre Majesté a conçu, dit en effet le rapport, il faudra supprimer les planchers de l’étage en attique, son comble, tous les murs de la partie supérieure de l’aile, etc. » — Vous l’entendez, nymphes de Versailles, fuyez vos paisibles bosquets, vos eaux tranquilles ! la royauté de juillet accourt avec son marteau : elle va faire rouler les pierres sur vos gazons, renverser sur leur face vos statues de marbre, et Dieu sait quand elles se relèveront ! car le rapport, qui est un chef-d’œuvre de précision, annonce à l’auguste auteur des ruines qui se préparent, que son projet n’avancera que très lentement, et qu’il n’aura pas, sans doute, la satisfaction de le finir. — Il est gros de choses, ce curieux rapport.

Le but de ce rapport, comme de toutes les choses de ce temps-ci, est tout autre qu’il ne paraît être.

D’abord, l’honneur en revient au roi lui-même, on ne peut en douter après avoir lu le morceau de M. de Montalivet. M. l’intendant de la liste civile n’a pas tout dit. Le roi a daigné corriger de sa main, à Cherbourg, ce rapport qu’il avait commandé avant son départ ; chaque mot a été soigneusement pesé par l’habile et sagace correcteur, et on ajoute que quelques petites négligences grammaticales ont été redressées par son auguste plume. Ce rapport était en effet d’une haute importance et méritait bien tous ces soins. On se souvient, sans doute, de ces dix-huit millions demandés avec tant d’instance par la liste civile, pour l’achèvement du Louvre, qu’elle avait pris l’engagement d’achever, sans augmentation de subsides ; on se souvient aussi que la chambre refusa assez durement cette allocation à M. Thiers. M. Thiers montra, à cette occasion, beaucoup d’humeur à la chambre. Il est vrai qu’on avait montré beaucoup d’humeur à M. Thiers en très haut lieu. Ce qu’on n’a pu obtenir pour le Louvre, on espère l’obtenir, à la session prochaine, pour le château de Versailles. Comment résister, en effet, à la bataille de Tolbiac et à la citadelle d’Anvers ! Eh quoi ! dira-t-on, aux députes récalcitrans, n’avez-vous pas lu dans notre rapport que Versailles sera rempli de ta-