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REVUE DES DEUX MONDES.

UN ESCLAVE, au-dehors.

Le consul est sorti.


Scène VII


TERENTIA, tenant Servilie par la main.

Viens, ma toute belle, le dieu a quitté le sanctuaire. Faibles mortelles, entrons.

SERVILIE.

Y songes-tu, mais s’il rentrait ? Je tremble. Maudits soient les hommes et leurs intrigues !

CICÉRON, à part.

Que peuvent-elles vouloir, ces femmes ?

TERENTIA.

Ne va pas calomnier leurs intentions. C’est pour nous qu’ils agissent, chère amie ; tu ne vois donc pas que nous aussi, nous sommes intéressées à cette révolution qui te fait peur. On dit que nous sortirons de cet état d’infériorité où la force brutale nous retient, que la femme va devenir l’égale de l’homme, que nous serons aptes à gouverner : je te vois déjà consul.

SERVILIE.

De grâce, ne ris point de mes terreurs ; profitons plutôt de l’absence du maître.

TERENTIA.

En rire, c’est en profiter.

SERVILIE.

Je veux sortir d’inquiétude, je veux que nous surprenions ensemble à ton mari le secret que je ne puis arracher au mien.

TERENTIA.

Que tu es curieuse ! Par Junon, je me résigne et j’attends. Tout ira bien, il n’y a point de dieu pour les maris.

SERVILIE.

Y en a-t-il un pour les amans ?

TERENTIA.

Tu en douterais, impie ! ingrate ! Tous les jours, Caius César n’est-il pas auprès de toi comme enveloppé d’un nuage, aux yeux de ton époux ?

SERVILIE.

Toujours, toujours ! oui, quand il restait étranger à toutes les folies de l’ambition.