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NOUVELLES LETTRES SUR L’HISTOIRE DE FRANCE.

Les noces de Galesvinthe furent célébrées avec autant d’appareil et de magnificence que celles de sa sœur Brunehilde ; il y eut même, cette fois, pour la mariée des honneurs extraordinaires ; et tous les Franks de la Neustrie, seigneurs et simples guerriers, lui jurèrent fidélité comme à un roi[1]. Rangés en demi-cercle, ils tirèrent tous à la fois leurs épées, et les brandirent en l’air en prononçant une vieille formule païenne, qui dévouait au tranchant du glaive celui qui violerait son serment. Ensuite le roi lui-même renouvela solennellement sa promesse de constance et de foi conjugale ; posant la main sur une châsse qui contenait des reliques, il jura de ne jamais répudier la fille du roi des Goths, et tant qu’elle vivrait, de ne prendre aucune autre femme. Galesvinthe se fit remarquer, durant les fêtes de son mariage, par la bonté gracieuse qu’elle témoignait aux convives ; elle les accueillait comme si elle les eût déjà connus ; aux uns, elle offrait des présens, aux autres elle adressait des paroles douces et bienveillantes ; tous l’assuraient de leur dévoûment, et lui souhaitaient une longue et heureuse vie[2]. Ces vœux, qui ne devaient point se réaliser pour elle, l’accompagnèrent jusqu’à la chambre nuptiale ; et le lendemain, à son lever, elle reçut le présent du matin, avec le cérémonial prescrit par les coutumes germaniques. En présence de témoins choisis, le roi Hilperik prit dans sa main droite la main de sa nouvelle épouse, et de l’autre jeta sur elle un brin de paille, en prononçant à haute voix les noms des cinq villes, qui devaient, à l’avenir, être la propriété de la reine. L’acte de cette donation perpétuelle et irrévocable fut aussitôt dressé en langue latine : il ne s’est point conservé jusqu’à nous ; mais on peut aisément s’en figurer la teneur, d’après les formules consacrées et le style usité dans les autres monumens de l’époque mérovingienne.

  1. Jungitur ergo thoro regali culmine virgo.
    Et magno meruit plebis amore coli…
    Utque fidelis ei sit gens armata per arma,
    Jurat, jure suo se quoque lege ligat.

    (Venantii Fortunati carmin., lib. vi, pag. 562.)

  2. Hos quoque muneribus permulcens vocibus illos.
    Et licet ignotos sic facit esse suos.

    (Ibid.)