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Le but de ces maisons pénitentiaires est, non-seulement de séparer de la société les individus qui pourraient lui porter préjudice, mais elles ont encore pour résultat d’améliorer ceux qu’elles séquestrent. En général, nos jeunes condamnés français sortent des prisons ou des bagnes plus corrompus qu’ils n’y sont entrés ; les condamnés vaudois, au contraire, en sortent meilleurs. Voilà sur quelle base logique le gouvernement a fait reposer cette amélioration.

La plus grande partie des crimes sont commis par la misère ; cette misère dans laquelle l’individu est tombé vient de ce que, ne connaissant aucun état, il n’a pu, à l’aide de son travail, se créer une existence au milieu de la société. Le séquestrer de cette société, le retenir emprisonné un temps plus ou moins long et le relâcher au milieu d’elle, ce n’est pas le moyen de le rendre meilleur, c’est le priver de la liberté, et voilà tout ; rejeté au milieu du monde dans la même position qui a causé sa première chute, cette même position en causera naturellement une seconde : le seul moyen de la lui épargner, est donc de le rendre aux hommes qui vivent de leur industrie, sur un pied égal au leur, c’est-à-dire avec une industrie et de l’argent.

En conséquence, les maisons pénitentiaires ont pour premier règlement que, tout condamné, qui ne saura pas un état, en apprendra un à son choix ; et, pour second, que les deux tiers de l’argent que rapportera cet état, pendant la détention du coupable, seront pour lui. Un article ajouté depuis complète cette mesure philanthropique. Il autorise les prisonniers à faire passer un tiers de cet argent à leur père ou à leur mère, à leur femme ou à leurs enfans.

Ainsi la chaîne de la nature, violemment brisée pour le condamné par un arrêt juridique, se renoue à des relations nouvelles. L’argent qu’il envoie à sa famille lui prépare, au milieu d’elle, un retour joyeux. L’intérieur dont son cœur a tant besoin, après en avoir été si long-temps privé, lui est ouvert, puisqu’au lieu d’y revenir flétri, pauvre et nu, le membre absent de cette famille y rentre lavé du crime passé par la punition même, et assuré de sa vertu à venir par l’argent qu’il possède et l’état qu’il a appris.

Plusieurs exemples sont venus à l’appui de cette merveilleuse