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DE LA MUSIQUE EN ANGLETERRE.

cultés prodigieuses d’un enfant si précoce, et la publia sous le titre de Paper on Crotch. La Société royale de Londres examina avec attention le petit prodige, et consigna ses observations dans les Transactions philosophiques ; enfin il fut décidé que l’Angleterre venait de voir naître le plus grand musicien du monde. De tant de merveilles, il n’est résulté que le docteur Crotch, qui n’est guère connu que des Anglais.

J’ignore quel est le mérite de M. Attwood comme professeur ; mais je sais par expérience que c’est un habile musicien et un compositeur de beaucoup de mérite. Dans sa jeunesse, il quitta son pays pour aller en Italie, puis en Allemagne où il se fixa auprès de Mozart. Ce grand maître lui donna des conseils, et M. Attwood acquit, dans cette fréquentation du plus grand artiste de son temps, une pureté de goût qu’on est étonné de rencontrer parmi les Anglais. Toutes les compositions de M. Attwood que j’ai entendues dans le voyage que je fis à Londres en 1829, se distinguent par un chant simple, élégant et expressif, par une harmonie très pure, et par une instrumentation remplie d’effet. Je ne doute pas que, si ce compositeur eût appliqué les inspirations de son génie à une langue moins rebelle et plus musicale que la langue anglaise, il ne se fût fait une grande réputation dans le reste de l’Europe ; mais tels sont les désavantages de cette langue, que les Anglais eux-mêmes n’aiment, de la musique à laquelle elle sert de soutien, que les petits airs et les chants nationaux. On peut affirmer que M. Attwood n’est pas estimé ce qu’il vaut, même par ses compatriotes ; la difficulté de se faire un nom comme compositeur, est telle en Angleterre, que ce musicien est réduit à donner des leçons qui le fatiguent, et qui usent son talent.

Le chant n’est pas dans une situation très florissante à Londres, ni dans aucune autre partie de l’Angleterre ; cependant il ne paraît pas que l’organisation des Anglais soit défavorable à cette partie de la musique. Malheureusement l’Académie royale de musique a eu rarement de bons maîtres pour en enseigner les principes et le mécanisme. Le compositeur Coccia, qui a demeuré quelque temps à Londres, y avait jeté les fondemens d’une bonne école ; mais, depuis son départ pour l’Italie, il a été remplacé par un signor Gabussi, fort protégé par de grandes dames, mais qui n’a