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« Pour prévenir ce résultat, il faudrait donc, disait M. Jollivet, interdire l’usage des progressions croissantes aux corps administratifs, et les réserver pour le trésor public seul ; mais si un tel instrument est dans la nature du régime social, pourquoi toutes les administrations locales ne s’en serviraient-elles pas ? »

L’impôt collectif ou de répartition oblige, comme on sait, les diverses circonscriptions administratives à verser au trésor un contingent déterminé et invariable, sauf à le répartir sur les contribuables des communes, en proportion de la fortune de chacun d’eux ; tandis que l’impôt de quotité oblige isolément chaque individu vis-à-vis du fisc.

Quand l’impôt est de répartition, chacun ayant à craindre d’être cotisé dans une proportion plus forte qu’il ne devrait l’être, son intérêt personnel le porte à empêcher la fraude de son voisin. Il en résulte une surveillance mutuelle qui économise un grand nombre d’agens à l’état, et lui garantit la perception entière de ses recettes. Mais les contribuables des communes ne peuvent être intéressés à l’intégrité des perceptions d’un impôt progressif.

Comment le seraient-ils ? Ce n’est pas la masse des richesses de la commune que l’état prend en considération, mais seulement la manière dont elle est distribuée. La base de cotisation agissant inégalement sur les contribuables, forme autant d’impôts séparés qu’il y a de fortunes inégales.

Afin d’obtenir les avantages propres aux impôts de répartition, vainement on essaierait de les rendre proportionnels à l’égard des communes, et progressifs à l’égard des contribuables, c’est-à-dire de taxer les communes en proportion géométrique de la masse de leurs richesses, sauf à répartir leur contingent sur les individus, conformément à l’échelle de progression adoptée.

Il arriverait, 1o en plusieurs cas, que de deux fortunes parfaitement égales, l’une serait écrasée par cet impôt collectivement proportionnel et individuellement progressif, tandis que l’autre, étant placée dans une commune contiguë, n’aurait presque rien à payer ; 2o en d’autres cas, que les fortunes médiocres ne pourraient suffire à l’impôt, même par la voie de l’expropriation.

On conçoit aisément que deux fortunes égales paieraient plus ou moins, selon qu’elles seraient situées dans une commune ou