bourreau difforme et bouffon, on ne pourra jamais le mettre au second plan ; car enfin il jouait sa partie et ne tuait que pour son compte. C’était pour frayer sa route, et non celle d’un autre, qu’il fauchait toute une moisson de têtes illustres. Le meurtre des enfans d’Édouard iv n’est que le dernier épisode de cette monstrueuse tragédie qui devait enfanter une royauté de deux ans. La disparition des deux jeunes frères n’eût servi de rien sans la mort de Clarence, de lord Rivers, de lord Hastings. Il fallait vider toutes les chambres du palais avant d’en trouver une qui fût paisiblement habitable, et Richard iii le savait bien.
La pénitence publique de Jane Shore, les accusations ignominieuses dirigées à la fois contre la mère et la veuve d’Édouard iv par Richard lui-même, ne sont pas non plus inutiles à l’achèvement de ce tableau historique, car elles montrent que le duc de Glocester se délassait parfois de la satiété du carnage dans de brillans intermèdes d’hypocrisie, et qu’après tout il ne versait le sang qu’à la dernière extrémité, quand la ruse, le mensonge, l’or, l’avilissement et la servilité avaient désappointé ses espérances. En attaquant la légitimité d’Édouard iv, il sapait la popularité de ses enfans.
Il semble donc, à la réflexion même la plus hâtée, qu’il n’y avait dans l’été de 1483 qu’une tragédie possible, dont le dénoûment aurait été l’avènement de Richard iii, et qui aurait eu pour exposition, pour nœud et pour moyens, les traits les plus saillans de la vie politique du Protecteur ; à savoir : la pénitence publique de Jane Shore, la fuite de la reine à l’abbaye de Westminster avec le duc d’York, l’accusation d’illégitimité portée contre ses fils et son mari, le meurtre d’Hastings et de Rivers, et, enfin, en présence d’une population menaçante, prête à se soulever pour un roi qu’elle ne connaît pas, en haine d’un tigre furieux dont elle a trop senti la sanglante morsure, la mort des neveux et la royauté de l’oncle.
Il eût été bon d’insister sur le côté jovial et satirique du caractère de Richard iii, et de mettre en scène ses paroles les plus connues, comme ce qu’il dit à l’évêque d’Ely ; les expressions dont il s’est servi en dénonçant à la malédiction publique, comme luxurieux, brigands, traîtres, concussionnaires, ses ennemis dont la