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caïman. Ceci aurait été plus dangereux que la promenade matinale d’Arion sur la mer :

Delphini incidens vada cærulea sulcat Arion.

« On nous tira plus de quarante pas sur le sable. Ce fut la première et la dernière fois de ma vie que je montai sur le dos d’un caïman. Si l’on me demandait comment je fis pour garder ma position, je répondrais : J’ai chassé le renard quelques années avec les chiens de lord Darlington. »

Cette excellente bouffonnerie me dispense de prendre au sérieux l’ouvrage de M. Waterton, et de relever quelques erreurs assez graves qui lui sont échappées en histoire naturelle, telles que, par exemple, de considérer, comme venimeux, les crochets que les boas portent près de l’ouverture anale. Je vous recommande ce livre, non comme instructif, mais comme très propre à dissiper le spleen. La traduction française dont je me suis servi a pour titre Excursions dans l’Amérique méridionale.


Nous avons reçu à l’occasion de l’article de M. le comte de Montalembert, sur le vandalisme en France[1], une lettre de M. Charlemagne Dupuy, à Saumur, dans laquelle il s’indigne de ce que notre jeune collaborateur l’a accusé d’avoir dévasté l’église de Cuneault, bâtie par Dagobert, et d’avoir maintenu la moitié de cet édifice dans l’état de dégradation et d’abandon où il se trouve aujourd’hui, tandis qu’au contraire il l’a trouvée ainsi en 1820, époque où il en est devenu possesseur, et qu’il a fait tous ses efforts pour arrêter une ruine plus complète. M. Dupuy déclare qu’il est prêt à céder à M. de Montalembert la propriété de la moitié de l’église, à condition que celui-ci fera exécuter à ses frais les réparations nécessaires pour y rétablir l’exercice du culte : il annonce en terminant que si d’ici à six mois, M. de Montalembert n’a pas accepté ces conditions, il le dénoncera lui-même au public, qui verra alors de quel côté il y a vandalisme.

Nous sommes charmés de voir que M. Dupuy ait pris à cœur des reproches auxquels on n’est en général que trop insensible, et dont il a compris toute la gravité. Notre collaborateur est tout prêt à reconnaître qu’il a été trompé par les renseignemens qui lui ont été fournis sur les lieux, il y a quelque temps, et à rétracter le blâme qu’il aurait mal à propos déversé sur ce propriétaire. Mais en vérité, nous pensons que M. Dupuy, dans la dernière partie de sa lettre, a voulu prêter à rire à nos lecteurs. La bizarre proposition qu’il fait à M. de Montalembert serait une vengeance ingénieuse, il est vrai, mais peu équitable, à ce qu’il nous semble. La

  1. Voyez le numéro du 1er  mars 1833.