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beauté ; vers le matin, depuis deux heures et demie, on vit, à l’est, les météores lumineux les plus extraordinaires ; M. Bonpland, qui s’était levé pour jouir du frais sur la galerie, les aperçut le premier. Des milliers de bolides et d’étoiles filantes se succédèrent pendant quatre heures. Leur direction était très régulière du nord au sud ; elles remplissaient une partie du ciel qui s’étendait de trente degrés vers le nord et le sud à partir du véritable point Est. Sur une amplitude de soixante degrés on voyait les météores s’élever au-dessus de l’horizon à l’est-nord-est et à l’est, parcourir des arcs plus ou moins grands, et retomber vers le sud après avoir suivi la direction du méridien. Quelques-uns atteignaient jusqu’à quarante degrés de hauteur ; tous dépassaient vingt-cinq à trente degrés. Le vent était très faible dans les basses régions de l’atmosphère, et soufflait de l’est ; on ne voyait aucune trace de nuages.

« M. Bonpland rapporte que dès le commencement du phénomène, il n’y avait pas un espace du ciel égal en étendue à trois diamètres de la lune que l’on ne vît à chaque instant rempli de bolides et d’étoiles filantes. Les premiers étaient en plus petit nombre ; mais comme on en voyait de différente grandeur, il était impossible de fixer la limite entre ces deux classes de phénomènes. Tous ces météores laissaient des traces lumineuses de huit à dix degrés de longueur, comme c’est souvent le cas dans les régions équinoxiales. La phosphorescence de ces traces ou bandes lumineuses durait de sept à huit secondes. Plusieurs étoiles filantes avaient un noyau très distinct, grand comme le disque de Jupiter, d’où partaient des étincelles d’une lueur extrêmement vive ; les bolides semblaient se briser comme par explosion, mais les plus gros, de un degré à un degré quinze minutes de diamètre, disparaissaient sans scintillement, et laissaient derrière eux des bandes phosphorescentes dont la largeur excédait quinze à vingt minutes : la lumière de ces météores était blanche et non rougeâtre, ce qui devait être attribué sans doute au manque de vapeurs et à l’extrême transparence de l’air. C’est par la même cause que sous les tropiques, les étoiles de première grandeur, en se levant, ont une lumière sensiblement plus blanche qu’en Europe.

« Depuis quatre heures le phénomène cessa peu à peu ; les bolides, et les étoiles filantes devinrent plus rares ; cependant on en