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se retrouve en outre dans toute conscience individuelle. C’est aussi là tout ce qui appartient à l’histoire, tout ce qui existe dans l’histoire.

L’histoire existe en vertu d’une nécessité transcendantale ; elle existe, parce que la réalisation universelle de la notion du droit est une tâche dont l’accomplissement a été imposé à l’homme sur cette terre, et que cette tâche ne peut être accomplie qu’au moyen du concours vers ce but de tous les efforts des êtres doués de raison. Ce but contient en soi l’objet et la raison de l’histoire, ou du moins de l’histoire considérée dans son ensemble, de l’histoire universelle. L’histoire consiste donc en une sorte d’objectivation d’une notion comprise d’abord dans l’intelligence humaine ; notion qui, dans la suite du temps, doit en venir à se placer extérieurement en opposition à elle-même. Quant aux arts et aux sciences, ils n’appartiennent pas précisément à l’histoire ; l’histoire de leurs progrès n’est pas partie intégrante de l’histoire proprement dite ; et s’ils se rattachent à l’histoire, c’est seulement sous le point de vue des moyens qu’ils peuvent fournir aux hommes de se nuire ou de se servir réciproquement dans leurs efforts pour atteindre le but auquel tous doivent tendre.

II.

La notion d’histoire contient celle de progressivité indéfinie. Cela ne suffit pas néanmoins pour conclure immédiatement la perfectibilité indéfinie de l’espèce humaine. Ceux qui nient cette perfectibilité nient de même en effet que l’homme soit plus apte que l’animal à posséder une histoire. Ils supposent l’homme emprisonné dans un cercle d’actes toujours le même, dans lequel il serait condamné à se mouvoir aussi éternellement qu’Ixion sur sa roue. Ils admettent que l’homme, jouet d’oscillations perpétuelles, tout en paraissant s’éloigner du point de départ, ne puisse pourtant éviter jamais d’y revenir l’instant d’après. D’un autre côté, ceux qui admettent le progrès ne laissent pas que de se trouver fort embarrassés sur la manière de le constater. Les uns veulent le mesurer par le perfectionnement moral de l’homme, les autres par le perfectionnement des arts ou des sciences. Or, cette dernière sorte de perfectionnement,