Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 2.djvu/132

Cette page a été validée par deux contributeurs.
126
REVUE DES DEUX MONDES.


ribles cruautés justifiaient en quelque sorte d’horribles représailles, où le sang demandait du sang ; mais déjà à la fin de 1809 et au commencement de 1810 la férocité, d’ailleurs fort exagérée, des Espagnols, avait disparu pour faire place à un vif désir de repos et de tranquillité, et, comme nous le verrons plus loin, Joseph serait sans doute venu à bout de pacifier son royaume, si l’empereur Napoléon eût voulu le lui laisser gouverner.

Au lieu de trouver à Séville, comme le maréchal Soult avait paru le craindre, une population ennemie ou au moins mal disposée, Joseph fut accueilli par les acclamations d’une multitude empressée de le voir ; il répondit à ces témoignages d’affection par des marques d’une noble confiance. Pendant le court séjour qu’il fit dans cette capitale de l’Andalousie, il sortait souvent à pied, sans escorte, et même sans suite, pour aller visiter les beautés de la ville, le port et le pont du Guadalquivir, la tour d’Hercule, l’alcazar mauresque, palais des anciens rois arabes, la cathédrale célèbre où les cendres de Christophe Colomb reposent à côté de celles des illustres capitaines de la maison de Gusman, la tour avec sa colossale girouette qui donne son nom à l’église, la Giralda ; enfin tous ces édifices remarquables, ces monumens curieux dont la réputation s’est si bien répandue en Espagne avec le dicton populaire :

Quien no ha visto Sevilla,
No ha visto maravilla.

Dans ces promenades, le roi profitait parfois de son incognito, pour répandre ses bienfaits sur les pauvres familles victimes de la guerre.[1]

    diables, et les remplacer par de bons Alsaciens, qui vous devront tout et vous seront attachés. »

    Le général qui commandait la garde impériale, détachée à Madrid en 1808, soutenait hautement que les choses n’iraient jamais bien, tant que les réverbères de la rue d’Alcala ne seraient pas remplacés par des grands d’Espagne. Il proposait, lors de la première entrée du roi à Madrid, en 1808, de placer ses Mameloucks dans l’escorte, et de les charger de couper les têtes de ceux, qui, se trouvant sur le passage de sa majesté, ne lui ôteraient pas leurs chapeaux.

  1. Joseph est essentiellement bon et charitable ; la générosité est une