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d’une multitude d’Indiens civilisés, recommence de nouveau. La ville de Rio-Grande est prise par les Espagnols et bientôt reconquise par les Portugais.

« Cependant de nouveaux revers forcent le Portugal à accéder au traité désavantageux de 1777. Des commissaires furent nommés pour fixer les limites de la province de Rio-Grande, et c’est aux retards que l’astuce apporta dans cette opération qu’on est redevable des excellens ouvrages de don Félix d’Azzara, qui, s’il n’est pas toujours exact sur les faits historiques, l’est si parfaitement lorsqu’il décrit ce qu’il a vu lui-même.

« Pendant que les commissaires portugais et espagnols employaient toutes les ressources de leur esprit pour avancer ou reculer les limites de Rio-Grande, cette province, profitant de la paix, augmentait ses richesses, envoyait des grains par mer dans les différens ports du Brésil, et faisait passer par terre de nombreux troupeaux dans les provinces de Sainte-Catherine. Cet état de prospérité durait depuis plus de vingt ans, lorsque éclata la révolution française. L’Espagne et la France, devenues alliées, déclarèrent la guerre au Portugal, et presque aussitôt on se battit en Amérique. Les Portugais furent presque partout victorieux, et un simple soldat, déserteur amnistié à force de courage et de témérité, conquit avec quarante hommes les anciennes missions de l’Uruguay. Une paix nouvelle ayant assuré cette conquête, le gouvernement secondaire de Rio-Grande fut érigé en capitainerie générale, et le commerce recommença à y fleurir. Cependant de nouvelles hostilités ont recommencé depuis, mais ces derniers évènemens sont encore trop récens pour être jugés avec une parfaite impartialité, et M. Pinheiro s’abstient d’en parler.

« C’est à peine un rapide sommaire que je viens de tracer, dit l’honorable académicien ; mais quel admirable morceau d’histoire il serait possible de faire, si, par la peinture des lieux et des mœurs, on répandait de la vie et du mouvement sur le récit des faits dont la province de Rio-Grande a été le théâtre depuis un siècle ! Quel intérêt on pourrait donner à l’histoire de cette province, si l’on mettait en opposition le caractère de ces deux nations voisines et rivales qui, pour se déchirer, se rencontrent encore dans les déserts de l’Amérique ; si, au milieu d’elles, on faisait paraître ces In-