Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 1.djvu/453

Cette page a été validée par deux contributeurs.
447
ACADÉMIE DES SCIENCES.

ainsi l’obstacle qui s’était opposé jusqu’à présent à la naturalisation de plusieurs espèces utiles.

M. Dumas fait, en son nom et celui de M. Brongniart, un rapport sur un mémoire de M. Gaultier Claubry, relatif aux calcaires nitrifiables des environs de Paris. Dans la première partie de son mémoire, la seule qu’il ait jusqu’à présent communiquée, M. Gaultier Claubry décrit le terrein dans lequel se trouvent les nitrières, et insiste sur les diverses circonstances qui lui paraissent venir à l’appui de l’opinion qu’il s’est formée sur le phénomène de la nitrification. Cette opinion est, suivant lui, pleinement confirmée par les expériences qui font l’objet de la partie non encore communiquée de son travail.

On sait que parmi les chimistes qui se sont occupés du phénomène de la nitrification, les uns considèrent l’intervention de matières animales comme indispensable, tandis que d’autres soutiennent qu’elle est seulement utile ; et M. Gaultier Claubry est au nombre de ces derniers. Ce qui est remarquable, c’est que les nitrières de la Roche-Guyon, qui fournissent à l’auteur du mémoire des argumens en faveur de la doctrine qu’il soutient, ont été également citées, comme fournissant des preuves à l’appui de la doctrine contraire. Cela tient à ce que les phénomènes présentés par les nitrières dont nous parlons, sont équivoques et peuvent être interprétés par chacun dans le sens de l’opinion qu’il a déjà.

À coup sûr, dit le rapporteur, on ne saurait attribuer à la quantité très petite de matières animales que l’analyse découvre dans les craies de la Roche-Guyon la formation presque indéfinie de nitre qu’on voit s’y opérer, mais de ce qu’on reconnaît cette insuffisance, il ne s’ensuit pas qu’on doive admettre, avec l’auteur du mémoire, que ces craies se nitrifient seules et sans le secours des terreins voisins. On ne serait fondé à conclure qu’elles agissent uniquement sur l’air qu’autant qu’on les aurait isolées, mises à l’abri de l’humidité qu’elles empruntent continuellement aux couches voisines. L’immense surface évaporante qu’elles présentent permet de concevoir que l’eau dont le sol voisin est pénétré, et qui renferme en dissolution des produits organiques vient sans cesse les imprégner et y porte les résidus organiques nécessaires à la formation du nitre. En arrivant à la surface, l’eau s’évapore en abandonnant les matières organiques qu’elle avait charriées, et est remplacée par d’autres, qui agissent de même. La couche de craie agit donc à la manière d’une éponge se desséchant à la surface, et reprenant par la capillarité l’humidité aux couches voisines ; ce qui, de proche en proche, fait arriver de loin les matières animales. Cette manière de concevoir la chose rend raison de certains faits, qui, jusqu’à présent, avaient dû embarrasser les partisans de la doctrine dans laquelle on attribue le rôle essentiel aux matières animales : ainsi dans les nitrières dont nous parlons,