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s’attache à ses pas !! Il part le 15 octobre 1827 pour Benguela, sans daigner s’occuper un instant de ce no du Diario fluminense du 19 décembre que j’ai cité, et qui contient une annonce d’encan de lui pour le 21 du même mois. À cette date, qui rend impossible sa présence au Congo au commencement de 1808, il oppose, tout triomphant, une attestation de deux habitans de ce pays, qui disent l’y avoir vu à cette époque. Lequel croire, d’un journal que je n’ai certainement pas fabriqué, ou d’une attestation qui a pu être extorquée par des importunités, et donnée sans en sentir les conséquences ?

J’écris à la hâte, car le temps me presse, et je me lasse de remuer cette fange. Je passe à la dernière partie du libelle, celle où M. Douville s’est roulé à plaisir dans la boue, content de s’y enfouir, pourvu qu’une parcelle pût en rejaillir sur moi. C’est là qu’il ne craint pas de m’accuser d’être la cause, par une lettre anonyme, du suicide d’une femme dont hier encore j’ignorais le nom. C’est là que, faisant parade d’un courage facile, il parle des cartels qu’il m’a adressés, et se vante de ses menaces d’assassinat, qu’il n’a pourtant pas osé mettre à exécution. Oui, je l’avoue, j’ai refusé de me battre avec un homme de son espèce ; l’honneur me prescrivait d’agir ainsi. Quand ses cartels se sont changés en menaces d’assassinat, et quelles menaces ! j’ai fait passer ces dernières à la police. Je le ferais encore. Quant aux injures dont m’accable à ce sujet M. Douville, elles ont à mes yeux, la même valeur que celles d’un malheureux sur la sellette, aux témoins qui l’accusent et aux juges qui le condamnent.

Mon langage, en réfutant ce libelle atroce, a été sévère : celui du Foreign Quarterly Review ne l’a pas été moins dans sa réponse à la Défense de M. Douville. Je ne puis mieux terminer qu’en citant ses propres paroles :

« M. Douville affecte de s’étonner de la sévérité dont on a usé à son égard. Il est trop peu éclairé pour comprendre tout l’odieux de son délit. S’il avait simplement publié un volume de faussetés, en se contentant d’en recueillir obscurément le profit, il aurait pu ne s’attendre qu’au silence du mépris ; mais en appelant sur lui, par une éclatante imposture, la renommée, les suffrages et les éloges d’hommes honorables, sa fraude, aggravée par son effronterie, méritait une ignominie particulière. L’homme qui se parjure est mis au pilori ; celui qui commet un faux en matière commerciale assume sur sa tête une plus grande flétrissure. Or, le crédit, la confiance, la bonne foi, ne doivent-ils pas être aussi bien protégés dans le monde littéraire que devant les cours de justice ou à la bourse ? » (Foreign Quarterly Review, no XX, octobre 1832, page 545.)

« M. Douville a été sévèrement puni, et nous l’abandonnons à l’infamie qu’il a si richement méritée. » Mr Douville has been severely punished, and we now leave him to the infamy he has so richly earned. » (P. 546.)


Th. Lacordaire.