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LITTÉRATURE SANSCRITE.

ches et de labeurs, il serait encore bien difficile à un seul homme d’en embrasser l’ensemble. Mais, lorsqu’on voit des savans comme les Colebrooke et les Wilson, entourés de tous les secours que peut accumuler un long séjour dans l’Inde, profondément versés dans la connaissance de nombreux idiomes, des hommes auxquels aucune branche des connaissances humaines n’est restée étrangère, s’abstenir de toucher à ce magnifique sujet, on peut affirmer qu’il surpasse les forces d’un seul homme, et que le temps n’est pas encore venu, où il sera permis d’en essayer même l’esquisse. Ce n’est pas que ces savans célèbres, et que, sur le continent, les Schlegel et les Lassen, les Bopp et les Humboldt, aient renoncé à jamais connaître l’Inde, pour laquelle leurs ouvrages ont déjà tant fait. Mais ces hommes, auxquels les sciences historiques et philologiques seront à jamais redevables des plus intéressantes découvertes, ont compris qu’il fallait s’avancer d’un pas régulier dans cette carrière nouvelle. Ils ont voulu appliquer à l’étude de l’Inde les procédés d’investigation qui ont porté si loin la connaissance de l’antiquité classique, aux xvie et xviie siècles ; et il faut dire à leur gloire que, de tous les travaux dont ce pays a été l’objet, ceux qui ont été dirigés dans cette voie sûre de la critique, sont encore les seuls qui aient porté de véritables fruits.

Quant à nous, messieurs, nous, venus après ces hommes illustres pour profiter de leurs leçons et nous éclairer de leurs exemples, nous n’aurons pas la présomption de tenter ce qui, sans doute, est impossible, puisqu’ils n’ont pas osé l’entreprendre. Nous nous rappellerons les enseignemens du savant maître qui nous a précédé dans cette chaire ; et nous ne perdrons pas de vue que, si nous apportons tous ici le désir de connaître l’antique civilisation des Brahmanes, le moyen le plus sûr pour y parvenir est de rester fidèles à la destination de ce cours, et de consacrer tous nos soins à en apprendre la langue. C’est donc à l’étude de la langue sanscrite que nous appliquerons ensemble ce que nous avons de constance et de zèle. Au lieu d’esquisses ambitieuses et condamnées long-temps encore à rester incomplètes sur l’histoire et la littérature des Indiens, nous analyserons l’idiome savant dans lequel ce peuple original s’est exprimé, nous lirons les monumens immortels qui attestent son génie, et nous nous consolerons d’avoir renoncé pour un temps à vous