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LITTÉRATURE SANSCRITE.

cours, acquérir l’intelligence du sanscrit ; le premier, il l’a professé dans cette chaire ; et quoique l’étude de cette langue ait, dans ces dernières années, pris des développemens plus considérables en Allemagne qu’en France, M. Chézy, outre le mérite d’avoir assuré à notre pays une honorable priorité, a encore celui d’avoir éclairé de ses conseils, sinon de ses leçons, les premiers pas des hommes célèbres qui l’ont presque popularisée chez nos voisins. Près de vingt années d’un travail constant lui avaient rendu familier cet idiome, jusqu’alors ignoré ; il le savait comme on sait ce qu’on a été obligé d’apprendre seul. À une grande aptitude pour les langues, M. Chézy joignait une finesse et une pénétration qui lui assuraient des succès faciles là où d’autres n’eussent rencontré que des obstacles insurmontables. L’habitude qu’il avait de lutter contre les difficultés que présente en général l’étude des langues de l’Orient, lui faisait rechercher toutes les occasions d’exercer la rare sagacité de son esprit ; et on peut dire que les efforts qu’il dut faire pour avancer dans cette route pénible, décidèrent, autant que son goût particulier, de la prédilection qu’il ne cessa de montrer pour ce que la poésie indienne a produit de plus raffiné et de plus ingénieux. Rien, dans cette partie de la littérature brahmanique, ne lui était resté inconnu ; il avait lu tout ce qu’en possède la Bibliothèque du Roi, et ces lectures, en augmentant son habileté dans l’intelligence des textes, avaient achevé de développer en lui le sentiment des beautés poétiques, et lui en avaient rendu l’expression si familière, que l’imagination semblait y avoir autant de part que l’érudition elle-même. C’est à l’heureuse alliance de ces mérites, qu’on est accoutumé de regarder comme inconciliables, qu’est due la belle édition du drame indien de Shakountala ; et on a droit de penser que, sans le fléau qui a si cruellement frappé les orientalistes français, ces mêmes mérites nous eussent valu d’autres ouvrages, faits pour ajouter moins à la réputation de M. Chézy qu’à notre instruction et à nos plaisirs.

Si je viens, après un maître qui savait répandre tant d’agrémens sur l’étude du sanscrit, vous entretenir du même sujet, j’ai besoin de compter sur l’intérêt croissant qu’excitent, depuis le commencement de notre siècle, les questions qui se rattachent à la langue, à la philosophie et à la religion de l’Inde ancienne et moderne.