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Seigneur, pourtant j’avais une jeune famille,
Doux anges dont l’essaim frais et riant fourmille
Aux genoux de leur mère, et ne s’informe pas
Si quelque guide un jour doit manquer à leurs pas.
J’avais une compagne (oh ! moitié de mon âme !)
Ange assis au foyer sous le nom de ma femme ! —
Elle croyait aussi qu’être unis c’était voir
Ensemble le matin, ensemble encor le soir. —
Seigneur, c’est dans leur sein que votre bras me frappe,
Si j’ai soif, je ne veux pour moi ni d’une grappe,
Ni d’une goutte d’eau pour me désaltérer…
Mais, ô famille en deuil ; condamnée à pleurer !

. . . . . . . . . . . . . . . .


les palmiers, par m. charles castellan, de l’île de france.


Ce modeste recueil, où une muse créole, nourrie des chants de Lamartine, s’essaie à peindre des émotions de cœur et des souvenirs du pays, révèle chez le jeune auteur une sensibilité vraie et un instinct naturel de mélodie et de tendresse. Les défauts sont ceux de l’inexpérience et d’un abandon parfois trop paresseux. On voudrait un style plus correct, plus soutenu dans les détails et plus de composition dans les sujets. Mais une âme de poète et d’amant s’y fait jour par de gracieuses images, par des soupirs sans effort. L’Épître à M. Michel, celle Aux mânes d’un vieux professeur, plusieurs des jolies pièces et sonnets à Elle, sont de charmans échantillons d’un talent voluptueux qu’un peu d’étude suffirait à perfectionner dans l’élégie. Que le jeune créole soit aussi correct que son compatriote Parny dont il paraît peu se souvenir ; il est bien aussi tendre, je pense, et il serait beaucoup plus naturel que lui. Nous ne voulons citer à l’appui de nos éloges que la stance suivante :

Oh ! c’est que j’aime tant ce sein qui bat si vite,
La goutte suspendue aux cils noirs de tes yeux,
La pente de ton front, ta taille si petite
Que je me fais enfant pour baiser tes cheveux !


Au Directeur de la Revue des deux Mondes.


Monsieur,

J’apprends que plusieurs recueils de vers ont été imprimés cette année, et que leurs éditeurs m’ont fait l’honneur de se souvenir de quelques-uns de mes premiers ouvrages pour les réimprimer ainsi. Malgré ce qu’il y a d’honorable dans ce souvenir je vous prie de déclarer que tout Keepsake, Album, Almanach, etc., etc., qui a publié ou publiera prose ou vers signé de moi, l’a fait ou le fera sans ma participation.


alfred de vigny.