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EXCURSION DANS L’OYAPOCK.

une foule de peuplades, qui n’en ont pas moins leur idiome propre. C’est ainsi que le galibi dans la Guyane, le guarani au Paraguay, la quichua au Pérou, servent de langue commune sur une étendue immense de pays.

Le portrait de ces Indiens a été tracé trop souvent pour qu’on puisse encore revenir sur ce sujet. Tout le monde sait que leur couleur varie du rouge cuivré au jaune brun ; que leurs cheveux sont gros, lisses, d’un noir foncé, et ne blanchissent jamais, même dans l’âge le plus avancé. Leur barbe est peu fournie, et ils l’arrachent au fur et à mesure de son apparition : mais on a avancé à tort, et même dans des écrits tout récens, qu’ils étaient dépourvus de poils sur le reste du corps. Ils en ont seulement un peu moins que les Européens. Leurs traits n’ont pas non plus cette expression stupide qu’on s’est plu généralement à leur attribuer, et expriment plutôt l’apathie et l’indifférence que le défaut de compréhension. J’en ai vu qui, pour l’expression de la physionomie et la beauté des formes, auraient pu servir de modèles aux artistes. Ils aiment à se barbouiller de genipa et de rocou sans se faire, du reste, aucune de ces mutilations aux lèvres, au nez et aux oreilles, qui rendent si hideux les Botocudos, et d’autres peuplades du Brésil. Leur vêtement, c’est le calimbé[1] pour les hommes, et le camisa[2] pour les femmes, et ces dernières vont fréquemment toutes nues, ce qui ne se voit jamais parmi les premiers. Leur vie, à moitié sédentaire, à moitié errante, les distingue encore des peuplades brésiliennes dont j’ai parlé plus haut, qui ne vivent absolument que du produit de leur chasse ou de leur pêche, et changent continuellement de place. Ainsi que ces dernières, ils sont d’une adresse incomparable dans ces deux exercices, et l’arc est entre leurs mains une arme presque aussi re-

  1. Le calimbé n’est autre chose que le langouty de l’Inde, et consiste en un morceau d’étoffe long et étroit, qui se passe entre les cuisses et se fixe autour des reins, soit en l’attachant, soit en l’y fixant au moyen d’une ficelle. Il est d’un usage général parmi les nègres de la colonie.
  2. Le camisa, mot emprunté aux Portugais, est une pièce d’étoffe qui se roule autour du corps, et descend ordinairement un peu au-dessous du genou. Les négresses et les femmes de couleur n’ont pas d’autre vêtement les jours ordinaires.