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suite et complément de la précédente. Même très-abrégée, elle serait encore trop longue pour le cadre de cette lecture, et d’ailleurs je voudrais vous donner maintenant de notre historien un échantillon d’un autre genre ; il y a, dans le précédent, beaucoup plus de dialogue que d’action : je vous en citerai un où c’est, au contraire, la partie narrative qui est la plus développée ; et ce nouvel exemple, je le prendrai dans le récit du siége de Beaucaire, conséquence immédiate et imprévue du concile de Latran.

Ce siége de Beaucaire fut l’événement militaire, sinon le plus important et le plus décisif, du moins le plus pittoresque et le plus singulier de toute la guerre des Albigeois, et c’est un de ceux sur lesquels notre historien s’est arrêté avec le plus de complaisance et de détails.

Mais pour pouvoir vous donner une idée plus juste de ce morceau remarquable, je dois le rattacher par quelques mots à ses antécédens immédiats.

Comme je vous l’ai dit tout-à-l’heure, Innocent iii, charmé de la grâce et touché du sort du jeune comte de Toulouse, le retint quelque temps auprès de lui après le départ de son père et du comte de Foix, il le combla de caresses, le rassura et l’encouragea par maintes paroles que l’histoire n’a point rapportées littéralement, mais qui furent sans doute pour quelque chose dans la confiance que le jeune prince prit dès-lors en sa destinée. Il avait été, comme je l’ai dit, décidé en concile que la Provence serait tenue en réserve pour lui, et lui serait donnée dès qu’il serait majeur, ou dès que le pape l’aurait jugé convenable.

Le jeune prince, à son retour de Rome, passa par Gênes, où l’attendaient son père, le comte de Foix et divers autres seigneurs de leur parti, et ils s’embarquèrent tous ensemble pour Marseille.

À peine le jeune comte eut-il mis le pied sur cette terre de Provence, qui lui était seulement promise et destinée sous condition, que de toutes parts, les villes, les campagnes et les châteaux se soulevèrent en sa faveur, le reconnurent sur-le-champ pour leur seigneur, et lui offrirent toutes leurs forces, pour commencer aussitôt la guerre contre Simon de Montfort. C’était de la part des Provençaux un mouvement généreux de sympathie pour les po-