sitions. Il y avait, dans la rudesse et la simplicité de leur ton, quelque chose d’éminemment populaire ; il y avait dans leur sujet un intérêt traditionnel, que les romanciers qui voulaient plaire aux masses, étaient obligés de respecter et de ménager. Ces compositions continuèrent donc à faire autant ou plus que jamais les délices des classes inférieures de la société.
Mais elles ne pouvaient plus avoir le même charme pour les classes supérieures, pour celles qui avaient pris au sérieux les idées nouvelles et les réformes de l’époque actuelle. Les Olivier et les Roland étaient des personnages trop rudes et trop simples, pour être désormais l’idéal poétique de la chevalerie, devenue le culte des dames et la passion des aventures. C’étaient des personnages usés pour ceux auxquels il fallait du nouveau, pour les meneurs de la société.
Dans cet état de choses, les plus élégans d’entre les troubadours, ceux qui avaient le plus à cœur le triomphe de la chevalerie, durent chercher et cherchèrent en effet des héros auxquels ils pussent prêter sans scrupule, et sans blesser les vieilles admirations poétiques, le langage et les sentimens, les impulsions et les actions chevaleresques : ces héros, ils les trouvèrent à la cour d’Arthur, le dernier roi des Bretons insulaires.
Cette découverte suppose, dans les romanciers provençaux, une certaine connaissance de l’histoire des Bretons, et une connaissance datant de la première moitié du xiie siècle, ce qui porte à croire qu’ils la puisèrent dans de simples traditions orales, ou dans des monumens aujourd’hui perdus, plutôt que dans la chronique latine de Geoffroy de Montmouth, ou dans les traductions galloises de cette chronique.
Mais de quelque manière et dans quelques documens qu’ils l’eussent acquise, cette connaissance des traditions bretonnes se réduisait, pour les romanciers provençaux, à celle de quelques noms propres dépouillés de toute vie, de toute réalité historique. — Les idées, les sentimens, les actes qu’ils ont prêtés aux personnages désignés par ces noms, tout ce qu’il y a de caractéristique dans les compositions romanesques où ils ont mis ces personnages en action, tout cela, dis-je, est méridional et pro-