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REVUE. — CHRONIQUE.

moins maritimes sont les meilleurs que renferme le livre de M. Eugène Sue. Le Présage est une peinture vive et animée de la bataille de Navarin. Les Aventures de Narcisse Gelin et les Voyages de Belissan sont des charges fort gaies et fort amusantes. Mon ami Wolf a peut-être le tort de rappeler trop et trop peu la Partie de trictrac de M. Mérimée. Le Remords et Crâo, dont la scène se passe en terre ferme, nous semblent tout-à-fait inférieurs aux morceaux que nous venons de nommer. M. Eugène Sue est vraiment un homme de mer ; hors de ses navires, on voit qu’il est mal à l’aise. Il trébuche et ne marche qu’à peine. Et puis son style perd infiniment à n’être point saupoudré de termes de marine. Cela lui ôte beaucoup de son éclat. Ce jeune écrivain fera donc bien, selon nous, de s’en tenir à sa spécialité. Qu’il continue de naviguer, tandis qu’il a le vent prospère ; seulement si quelque orage brise jamais son bâtiment et le jette à la côte, alors ce sera pour lui le temps de prendre terre, si faire se peut.

Nous ne terminerons pas sans annoncer aux amateurs de livres aimables et curieux la publication depuis si long-temps attendue du Déburau[1] de M. Jules Janin. Oui, le Déburau de M. Jules Janin. M. Jules Janin peut bien dire cette fois mon Déburau, sans que personne lui conteste le pronom possessif. C’est M. Jules Janin qui a fait ce grand homme. Ce grand homme lui appartient. L’histoire complète qu’il nous en donne est assurément l’un de ses plus jolis feuilletons. C’est une charmante plaisanterie en deux charmans volumes dignement illustrés par le crayon spirituel de M. Tony Johannot. Rien ne devait manquer à cette consécration de la gloire de l’illustre pierrot des Funambules.


la revue.
  1. Chez Gosselin.