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ROMANS CARLOVINGIENS.

plaindre des rois et de leur résister, on ne peut nier qu’il n’y eût dans leurs entreprises quelque chose d’héroïque et de poétique, et il serait étonnant que l’épopée à demi barbare du douzième siècle ne s’en fût pas emparée comme d’un thème fait pour elle. Aussi s’en empara-t-elle de bonne heure ; et c’est du parti qu’elle en tira que j’aurais besoin de vous donner quelque idée.

Il existe encore aujourd’hui plusieurs de ces romans qui roulent sur des incidens de cette lutte des rois contre leurs ducs ou leurs comtes rebelles. Quelques-uns de ces incidens sont célèbres dans l’histoire, d’autres y sont inconnus et peut-être de pure invention. C’est tantôt Charles Martel, tantôt Louis-le-Débonnaire, beaucoup plus souvent Charlemagne, qui figurent dans ces romans comme souverains, comme adversaires des chefs révoltés.

Ceux de ces mêmes romans qui roulent sur les guerres de Gérard de Vienne ou de Roussillon contre Charles-le-Chauve, sont des plus anciens et des plus célèbres. — On en connaît trois ou quatre, où le même sujet est traité d’autant de manières différentes : l’une de ces rédactions, indubitablement la plus ancienne des quatre, en est aussi à tous égards la plus remarquable ; mais je m’abstiens de vous en parler davantage ici, devant ailleurs vous en donner une analyse suivie et détaillée.

Un roman du même genre, quoique moins intéressant et moins célèbre, est celui de Gaydon, duc d’Angers, un des paladins échappés au désastre de Roncevaux. Charlemagne se brouilla assez sottement avec lui par les intrigues d’un certain Thiebaut d’Aspremont, frère de ce Ganelon qui avait machiné la mort de Roland et des douze pairs. Gaydon, après maint avantage remporté sur Charlemagne, est assiégé dans les murs d’Angers ; mais la brouillerie n’est pas poussée aux dernières extrémités : elle se termine par une paix glorieuse pour Gaydon, et par la punition du traître qui avait mis le paladin aux prises avec l’empereur.

Un comte de Toulouse ou de Saint-Gilles, nommé Elie, est représenté de même dans un autre roman comme la victime des calomnies d’un autre traître, nommé Macaire. Louis-le-Débon-