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du pape Clément iv ; elle avait eu lieu l’année précédente. Le légat qu’ils trouvèrent à Acre leur conseilla de ne pas parler de l’ambassade dont ils étaient chargés, avant l’élection d’un nouveau pape, ce qui décida les voyageurs à profiter de cet intervalle de temps pour aller revoir leur famille à Venise.

En arrivant dans leur patrie, Nicolo Polo apprit que sa femme, qu’il avait laissée enceinte, était morte en accouchant d’un fils auquel elle avait donné le nom de Marco, en mémoire du frère aîné de son mari. Ce fils, dit la relation, était près de toucher à l’âge viril, et d’après la confrontation des dates incertaines du départ avec celle du retour, 1269, on estime que Marco Polo le célèbre voyageur, fils de Nicolo et auteur de la relation qui nous occupe, était né en 1254, et avait seize ans lorsqu’il vit son père.

Le pape Clément iv était mort à Viterbe au mois de novembre 1268, et ce ne fut qu’au mois de septembre 1271 que Grégoire x, son successeur, fut élu. Pendant trois ans, le sacré collége resta assemblé dans Viterbe et même tenu enfermé par le Podesta de la ville sans pouvoir se réunir. Enfin, par le conseil de saint Bonaventure, présent et cardinal lui-même, il se détermina à faire un compromis entre les mains de six de ses membres, lesquels élurent tout d’une voix Thealde (Théobalde), qui n’était autre que ce légat du pape que les voyageurs vénitiens avaient trouvé à Acre, et qui leur avait conseillé de ne faire connaître l’objet de leur mission qu’après l’élection du pape.

Mais les Polo n’eurent pas la patience d’attendre la décision du sacré collège. Craignant donc d’encourir la disgrâce de leur protecteur asiatique, Maffio et Nicolo prirent la résolution d’aller retrouver le légat à Acre pour s’entendre avec lui et reprendre le chemin de l’Asie. Ce fut dans cette occasion que les deux voyageurs vénitiens emmenèrent avec eux le jeune Marco Polo, fils de Nicolo. Arrivés à Acre, ils se munirent de lettres que le légat leur donna pour remettre à l’empereur de Tartarie, et ils s’embarquèrent pour Ayas. Mais à peine avaient-ils mis à la voile, qu’ils reçurent avis que le légat Théobalde de Plaisance était nommé pape. Ce nouveau pontife ayant fait revenir vers