tement préparées pour elles par le citoyen Saint-Just, âgé de vingt-six ans.
Je lus d’abord avec distraction, puis les idées me montèrent aux yeux, et je fus stupéfait de ce que je voyais.
(Ô naïf massacreur, ô candide bourreau, m’écriai-je involontairement, que tu es un charmant enfant ! eh ! d’où viens-tu, beau berger ? serait-ce pas de l’Arcadie ? de quels rochers descendent tes chèvres, ô Alexis !)
Et en parlant ainsi je lisais :
« On laisse les enfans à la nature.
« Les enfans sont vêtus de toile en toutes les saisons.
« Les hommes qui auront vécu sans reproche, porteront une écharpe blanche à soixante ans.
« L’homme et la femme qui s’aiment sont époux.
« S’ils n’ont point d’enfans, ils peuvent tenir leur engagement secret.
« Tout homme âgé de vingt-et-un ans est tenu de déclarer dans le temple quels sont ses amis.
« Les amis porteront le deuil l’un de l’autre.
« Celui qui dit qu’il ne croit pas à l’amitié, ou qui n’a pas d’amis, est banni.
« Un homme convaincu d’ingratitude est banni. »
(Quelles émigrations, dis-je !)
« Si un homme commet un crime, ses amis sont bannis.
« Les meurtriers seront vêtus de noir toute leur vie, et seront mis à mort, s’ils quittent cet habit. »
Âme innocente et douce, m’écriai-je, que nous sommes ingrats de t’accuser ! Tes pensées sont pures comme une goutte de rosée sur une feuille de rose, et nous nous plaignons pour quelques charretées d’hommes que tu envoies au couteau chaque jour à la même heure. Et tu ne les vois seulement pas, ni ne les touches, bon jeune homme ! Tu écris seulement leurs noms sur du papier ! — moins que cela, tu vois une liste et tu signes ! — moins que cela encore, — tu ne la lis pas et tu signes !
Ensuite je ris long-temps et beaucoup du rire joyeux que vous savez, en parcourant ces institutions dites républicaines,