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bord distincts, l’aient entouré ; ce trou peut être déjà existant dans le cartilage, et la matière osseuse peut l’enceindre petit à petit ou tout à-la-fois, sans jamais être divisée en plusieurs pièces.

6o Le cartilage préexistant avec tous ses caractères avant qu’il se montre aucun symptôme d’ossification, la manière dont cette ossification se fait, le nombre plus ou moins grand des noyaux où elle commence, la direction selon laquelle ces noyaux s’étendent, ne sont d’aucune considération dans la discussion de ces doctrines connues sous le nom d’épigénèse et d’évolution ; surtout on ne peut en déduire aucune preuve en faveur de l’épigénèse.

7o Les grains osseux qui doivent donner au sternum son caractère se déposent successivement par l’effet de la nutrition et l’action des artères, non pas sur, mais dans la substance du cartilage. Ces molécules osseuses s’interposent entre celles du cartilage qui s’écartent pour les recevoir, et qui finissent par leur céder en partie la place. Il y a donc dans ce mode de durcissement, de la part du cartilage, une véritable intus-susception qui n’a rien de commun avec la juxta-position opérée dans la formation des dents et des coquilles, mais qui ressemble bien plutôt à la transformation de substance que ces mêmes dents, ces mêmes coquilles éprouvent si souvent dans l’intérieur de la terre.

Une réclamation de M. Serres, relativement aux trois dernières conclusions, donne lieu à une explication entre M. Cuvier et lui ; explication d’où il résulte seulement que les deux académiciens attachent aux mêmes mots une valeur différente, et qu’ainsi, par exemple, tandis que par ossification M. Cuvier entend la déposition du phosphate calcaire dans le cartilage, M. Serres entend la formation du cartilage lui-même. Les deux adversaires ne se rencontrent donc pas ici sur le même terrein, et il faudra que ce soit sur quelque point plus reculé, que les deux doctrines de l’épigénèse et de l’évolution en viennent enfin à se prendre corps à corps. Quoi qu’il en soit, les faits recueillis par M. Cuvier sont désormais acquis à la science et ne perdront jamais rien de leur valeur.

M. Delpech lit, en son nom et celui de M. Coste, un mémoire sur les monstruosités, faisant suite au travail précédemment présenté par les mêmes auteurs sur la formation de l’embryon.

La monstruosité, à l’occasion de laquelle a été écrit ce mémoire, s’est offerte dans un œuf de poule, observé après trente-six heures d’incubation, mais dont le développement semble avoir été retardé de près de dix heures. On y voit deux germes avec leurs tapis qui chevauchent un peu l’un sur l’autre. L’appareil nerveux est bien marqué dans les deux ; mais il est moins avancé dans celui dont le tapis est engagé sous l’autre. Les axes des deux appareils nerveux ne sont pas parallèles ; celui du plus grand est dirigé parallèlement à la ligne des deux chalazes, l’autre forme avec cette ligne un angle d’environ 45°. Les auteurs du mémoire considèrent ce défaut de parallélisme entre les deux axes nerveux, non comme une disposition primitive, mais comme le résultat des forces qui président au développement des embryons, comme étant déterminée par la direction des courans électriques, dont ils admettent l’existence