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LETTRE
DE M. LE BARON DE MONTBEL
SUR LE CHOLÉRA DE VIENNE.[1]


Vienne le 26 février 1832.
Monsieur,

Je m’empresse de vous donner les renseignemens que vous m’avez demandés sur l’attaque du choléra dont j’ai été atteint à Vienne, soit dans le moment de l’invasion, soit dans ses suites, ainsi que les différentes observations que j’ai recueillies pendant que ce fléau a régné dans la capitale de l’Autriche. Heureux si la maladie que j’ai éprouvée me met à même de vous seconder dans vos nobles travaux, en vous fournissant quelques renseignemens utiles à mes compatriotes, pour qui l’exil n’a diminué ni mon intérêt, ni mon attachement.

Les approches du choléra avaient répandu une grande consternation à Vienne. Les dispositions prises pour isoler Schoenbrun, le Belvédère et quelques autres établissemens, avaient produit sur la population une sensation pénible. L’effroi n’était pas calmé par des précautions qui tendaient cependant à s’opposer aux progrès du mal et à en diminuer les ravages. Plusieurs maisons étaient converties en hospices ; quelques barrières devaient intercepter des communications dangereuses avec ces établissemens ; des commissaires, des médecins, étaient affectés à la surveillance des divers arrondissemens de la ville. Le gouvernement faisait distribuer des meubles, fournir des logemens plus spacieux aux familles nécessiteuses, reblanchir, à la chaux, l’intérieur des appartemens qu’elles occupaient : il organisait en même temps les moyens d’assister les pauvres à domicile, de leur fournir du linge et des vêtemens propres, de leur assurer une nourriture saine et suffisante. Chaque hospice était abondamment

  1. Cette lettre est adressée à M. le docteur Guyon, qui a fait partie de la commission médicale envoyée en Pologne.