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BRAUNSBERG LE CHARBONNIER.

du collier et de Giuseppe de la laisser en repos ; elle le pria de croire qu’il s’était mépris. Cette fois elle ne parla plus de dénoncer le maître du collier à son mari. Elle desirait même que M. le baron, qui paraissait être un homme de naissance et de distinction, liât connaissance avec son mari. Alors seulement elle pourrait recevoir M. le baron, sous la condition expresse qu’il ne s’agirait plus de diamans ni de colliers. La dame donna même un louis à Giuseppe pour sa peine, et Giuseppe eut le courage de refuser le louis, en affirmant que son maître, le plus grand et le plus magnifique seigneur de toute l’Allemagne, lui donnait plus d’argent qu’il n’en pouvait dépenser : c’était pour Giuseppe faire en prince les affaires du baron.

Le baron resta trois jours sans me parler de la jeune dame. Je pensai qu’entraîné dans le mouvement si rapide de son existence, il avait perdu de vue les amans de la grande allée du bois de Boulogne. Quelle fut ma surprise, quand le baron me montra une lettre d’invitation de bal, que le mari de cette jeune femme venait de lui envoyer pour le lendemain ! Nous nous rendîmes à l’invitation. La maîtresse du logis était resplendissante ; sa toilette d’une exquise élégance. Il ne lui manquait qu’une rivière de diamans pour couper la monotone blancheur de son beau cou et de ses belles épaules. Nous fûmes reçus à merveille par la dame, et encore mieux par le mari. Je ne sais comment cela se fit ; mais les femmes ont sur nous tant de supériorité de tact et d’esprit ! Ce fut le mari qui présenta lui-même à sa femme M. le baron de Neutitschein.

M. de Neutitschein causa long-temps de choses indifférentes avec la maîtresse de la maison. Il fut enfin question des dames parisiennes, de leur esprit, de leur goût, de leurs qualités diverses, de la charité qu’elles avaient vouée aux pauvres. La dame était elle-même une dame de charité. M. le baron se permit de lui adresser quelques reproches sur ce qu’elle l’avait oublié dans ses pieuses visites. Elle lui promit de réparer sa faute. C’était un excellent prétexte.

Le lendemain, en effet, la dame de charité fut présentée au salon du baron. J’eus le soin de m’esquiver, et je me tins pour-