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salut de la littérature. Comme il avait traduit en exil quelques odes d’Horace, rimé quelques sonnets et plusieurs madrigaux, au sein même de l’atmosphère royale, il avait compris que les questions de gloire et de poésie ne peuvent pas se décider comme un projet de canalisation, comme la concession d’une mine.

Mais nous sommes arrivés à une ère palingenésique. L’éclectisme politique de M. Victor Cousin est comme non avenu. Les prophéties du dieu mort, il y a quelques années, après avoir essayé de hâter sa transfiguration par un coup de pistolet, commencent à se réaliser. Nous entrons dans une voie étrange et inconnue. Voici que la grande et la moyenne propriété se saisissent souverainement de toutes les questions livrées jusqu’ici aux lettres, aux prolétaires et aux savans, gens de labeur et de rien.

Puisque les théories chimiques de Lavoisier et de Davy chancellent et menacent ruine, puisque Berzelius et Œrstedt menacent de détrôner la nomenclature, puisque M. George Cuvier et M. Geoffroy de Saint-Hilaire ne peuvent s’accorder, puisque Fresnel a battu en brèche le système de Newton, ne pourrait-on prier les chambres de résoudre ces questions ? Ne pourrait-on, en vertu des 500 francs qui donnent à ces messieurs le droit de trancher toutes les difficultés, les supplier d’apporter leurs lumières dans les ténèbres de la science ?


P. S. Le procès de M. Carrel a eu l’issue que nous avions annoncée, et qu’il était facile de prévoir d’après l’instruction de M. Corthier. Le rédacteur en chef du National a prononcé un discours d’une haute raison et d’une vive éloquence. Il a montré la force de la modération. MM. Barrot et Comte avaient une tâche facile, et qu’ils ont dignement remplie ; la décision négative du jury sur toutes les questions qui lui étaient soumises a été accueillie par d’unanimes applaudissemens. C’est une belle victoire et noblement gagnée.


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