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parurent avoir été détachés des sommets et avoir roulé dans les lieux où je les apercevais. En gravissant ces montagnes, nous découvrîmes deux buffles, qui, étonnés de notre approche, sautèrent, en fuyant, dans un précipice. Des nègres, que nous rencontrâmes, nous apprirent que nous n’étions pas très éloignés de la banza du soba Hango, qui habitait au milieu de la forêt située de l’autre côté de la montagne. Ils s’offrirent à nous servir de guides, et me donnèrent des informations très utiles sur ce chef et sur son peuple, qu’ils me dépeignirent comme très enclins à attaquer un voyageur blanc. L’occupation ordinaire de ces nègres était d’aller attendre sur la route du Bihé les marchands portugais, pour les piller. Malgré la distance à parcourir, l’idée du danger, loin de les effrayer, redoublait leur courage. Nous arrivâmes le lendemain d’assez bonne heure près de la banza de Hango. Je ne voulus pas y faire entrer ma caravane.

Ce chef, lieutenant-général et parent de Cunhinga, jouissait de toute son amitié, et était son conseiller dans les affaires importantes. Je lui fis un cadeau assez considérable, afin d’éviter tout acte hostile, qui n’eût pas manqué de me coûter la vie. Il me reçut amicalement ; mais d’après les renseignemens que mes guides m’avaient donnés, je me tins sur mes gardes. Il me parla beaucoup de Cunhinga : il me le peignit comme un chef très puissant, et il me représenta le danger que je courais, en me dirigeant vers sa banza, sans en avoir préalablement obtenu la permission, parce qu’il pourrait me regarder comme un ennemi, surtout après ce qui s’était passé avec les habitans d’un village de ses sujets, dont plusieurs étaient allés se plaindre. Profitant de ces avis, je fis préparer un présent que j’envoyai à Cunhinga ; mes émissaires devaient lui annoncer mon arrivée sur ses terres, et mon intention de passer dans sa banza, enfin l’assurer de mon amitié. Je partis le lendemain pour la résidence de Cunhinga, sans attendre le retour de mes envoyés. À peu de distance de la banza de Hango, je les rencontrai ; ils avaient marché toute la nuit, et revenaient accompagnés de quelques nobles de Cunhinga, chargés de reconnaître la force de ma caravane, de s’informer du but de mon voyage, et de m’enjoindre d’attendre les ordres de leur maître.