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EXCURSIONS DANS LE VENEZUELA.

la sécheresse, ces îles sont pleines de cerfs qui y viennent à la nage, pour s’y mettre à l’abri du soleil, des panthères, et des jaguars qui infestent les bords du fleuve. Les serpens d’eau sont aussi très nombreux dans cette partie de l’Orénoque, et les voyageurs en rencontrèrent souvent nageant d’une île à une autre, et à leur grande terreur, il y en eut plusieurs qui sautèrent par dessus les bateaux, sans tenter cependant de leur faire aucun mal. Ces serpens sont vert clair, ont cinq à six pieds de long, et nagent avec un tiers de leur corps environ hors de l’eau. Les patrons des embarcations évitent autant que possible de passer sous les arbres qui avancent sur le fleuve, de peur que le mât n’en détache quelques-uns des branches ; le serpent à sonnettes se trouve souvent parmi eux ; il a huit pieds de long, et est gros en proportion. — Nos voyageurs eurent beaucoup à souffrir des moustiques, pendant la nuit qu’ils passèrent à terre ; la fumée de leur feu ne les en préservait pas. Les Indiens leur conseillèrent de se retirer tranquillement à cent pas environ de la compagnie, et de se coucher par terre en silence : cela leur réussit complètement, mais ce n’est pas un moyen à employer sur les bords de l’Orénoque, car la crainte de quelques panthères dans le voisinage, ou la visite d’un alligator ou d’un serpent d’eau, vous ôte toute envie de dormir, et vous force bientôt à aller rejoindre le feu que vous avez quitté.

Parmi les plantes médicinales et vénéneuses qui croissent sur les bords de l’Orénoque, une des plus singulières est une sorte de bejuco, qui, bien administrée, est un remède contre les morsures des serpens. On en fait des cataplasmes qu’on applique sur la blessure. Bien plus, cette plante semble priver les reptiles de leur puissance, et leur ôter la faculté de se servir de leurs dents ; car, lorsque les Indiens en ont quelques feuilles dans la main, ils les prennent sans la moindre crainte. Le tremblador ou l’anguille électrique se trouve aussi fréquemment dans ce fleuve et les rivières des environs. Elle a cinq pieds de long et est plus grosse que les anguilles ordinaires. Sa couleur est vert foncé, tacheté de jaune depuis la tête jusqu’à la queue. Quelques instans après avoir été prise, elle donne à celui qui la tient une si