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EXPLORATION DE L’AMÉRIQUE.

vent les Portugais eux-mêmes dans les ports du Brésil. Les Hollandais et les Anglais parurent les premiers à l’extrémité australe du continent, et des flibustiers, tels que Davis, Dampier, Grogniet, Sharp, Woodes-Rogers, Cowley, Wafer, etc., connurent bien mieux que les Espagnols les moindres enfoncemens de la mer des Antilles, beaucoup de points des rivages du Pérou, du Mexique et de la Californie. Pour preuve de cette vérité, ne consulte-t-on pas encore leurs itinéraires dans le Darien, lorsqu’on propose de couper cet isthme ?

Il devint nécessaire, quand la navigation se perfectionna et prit de l’étendue, d’en diminuer les dangers en corrigeant les erreurs des cartes. Alors tous les peuples à l’envi firent exécuter dans leurs propres colonies des travaux qui ne furent point d’abord parfaits, mais qui reçurent des améliorations successives, auxquelles l’admirable invention des montres marines contribua puissamment. Les Espagnols particulièrement, dont les connaissances géographiques avaient décru depuis la fin du xviie siècle, furent contraints de lever de nouveaux plans pour remplacer ceux que les étrangers falsifiaient, et diriger leurs marins dans des voyages qui reprenaient le caractère de découvertes. D’immenses richesses hydrographiques furent réunies et conservées dans un dépôt que dirigèrent successivement, depuis 1797, Espinosa, Bauza et M. de Navarrete, le digne éditeur et commentateur de Colomb et de ses émules. Les Français furent conduits au même résultat par un autre but : d’abord ils voulurent fixer la longueur de leurs traversées par la largeur de l’Atlantique ; puis après, les épreuves des montres marines donnèrent naissance aux premières explorations exactes. Les vigies multipliées sur les anciens routiers forment ici un épisode qui se rattache à notre histoire. Quelques-unes durent leur origine à des méprises timides qui se renouvellent de nos jours, tandis que d’autres furent le fruit de l’avarice dans un moment où l’on récompensait leurs découvreurs ; enfin on peut attribuer le plus grand nombre au système de quelques Hollandais qui voulurent effrayer des rivaux par les périls de la mer, et forcer en même temps leurs pilotes à la vigilance.