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EXPLORATION DE L’AMÉRIQUE.

véracité de Baffin, ont fait flotter sur l’île Melville le pavillon de la Grande-Bretagne, isolé le Groënland, montré jusqu’où les marins pouvaient reculer les bornes de l’audace, et prouvé que la solution pratique du passage nord-ouest ne dépendait que d’une saison favorable. Les périlleuses excursions de Franklin, de Richardson, de Back et de Vood, d’abord à l’embouchure des rivières de Cuivre et de Mackenzie, et ensuite sur tout le littoral de l’Amérique polaire, ont contribué puissamment à éclaircir le problème en fournissant sur l’Océan boréal des lumières presque complètes qui rendront peut-être superflues de nouvelles expéditions maritimes. Les derniers pas de Franklin ont foulé le sol à cent lieues de la chaloupe de Beechey, et en franchissant une faible distance, Richardson aurait rejoint les dernières bornes posées par Parry. Cependant celui-ci, renonçant à traverser avec un vaisseau les glaces éternelles, leur demandait en vain de s’arrêter pour lui permettre l’accès du pôle. Ces îles flottantes, entraînant vers le sud l’intrépide voyageur, semblaient être les gardiennes d’un sanctuaire inaccessible aux hommes. En 1816, le navire le Neptune n’en avait été séparé que par un espace de cent trente lieues ; c’était un grand motif d’espoir.

La recherche des colonies danoises de L’OEsterbygd avait donné naissance, en 1786, aux expéditions de Lœwenorn, d’Egede et de Rothe, que l’accumulation des glaces rendit infructueuses. En 1823, Scoresby, plus favorisé, put enfin tracer la plus grande partie des rivages orientaux du Groënland, qu’il fut porté à considérer comme un archipel rendu compact par les effets de son climat. Clavering eut aussi quelques succès dans les mêmes parages ; mais il ne fut pas plus heureux que Buchan et Franklin ne l’avaient été en 1818, en voulant renouveler l’entreprise de Phipps.

Toutes les entreprises polaires reposaient nécessairement sur l’idée que l’Amérique était détachée de l’Asie ; cependant cette grande question resta irrésolue jusqu’au dernier moment. Malgré des mécomptes semblables dans les systèmes anciens qui avaient réuni l’Inde à l’Afrique méridionale, et les prétendues terres